Le libéral Bronislaw Komorowski, 58 ans, et le conservateur Jaroslaw Kaczynski, 61 ans, s'affronteront au second tour de l'élection présidentielle le 4 juillet en Pologne, l'électorat de gauche devant, paradoxalement, les départager.

Au premier tour dimanche, le président par intérim Bronislaw Komorowski, du Parti pro-européen Plateforme Civique (PO), a obtenu 41,22% des voix, contre 36,74% pour M. Kaczynski, chef du parti nationaliste Droit et Justice (PiS) et frère jumeau du chef de l'État décédé en avril, selon des résultats portant sur 94,3% des bureaux de vote.

Mais le candidat de gauche, le social-démocrate Grzegorz Napieralski, 36 ans, a créé la surprise en recueillant 13,7% des suffrages, si bien que l'issue du second tour dépendra en grande partie du choix que feront ses électeurs, ainsi que du taux de participation (54,85% au premier tour).

Les Polonais étaient appelés aux urnes après la mort du président Lech Kaczynski, tué le 10 avril dans un accident d'avion à Smolensk, en Russie.

«Grzegorz Napieralski a gagné un important capital politique qui pourra faire pencher la balance au second tour. On a pu voir déjà les premières tentatives de séduction de la part des deux principaux candidats», a déclaré à l'AFP le sociologue Edmund Wnuk-Lipinski.

Après la publication dimanche soir des sondages réalisé à la sortie des bureaux de vote, MM. Komorowski et Kaczynski se sont empressés de féliciter M. Napieralski.

«Je voudrais que ce résultat apporte des temps meilleurs à la gauche polonaise, absolument indispensable sur la scène politique en Pologne», a dit M. Komorowski.

«Je remercie Grzegorz Napieralski pour son initiative d'une table ronde sur l'état des services médicaux», très critiqués en Pologne, a déclaré M. Kaczynski.

Un porte-parole du candidat conservateur, Pawel Poncyliusz, a affirmé lundi à la radio que le programme du leader social-démocrate avait «beaucoup d'éléments en commun» avec celui de M. Kaczynski.

Grzegorz Napieralski a refusé dans l'immédiat de donner une consigne de vote. «Si je dois apporter mon soutien à quelqu'un, ce sera en fonction des valeurs concernant l'avenir de la Pologne», a-t-il dit.

M. Napieralski pourrait toutefois poser des conditions difficiles à accepter par les deux candidats. Parmi elles, l'accès libre et financé par l'État à la fécondation in vitro et l'adoption par la Pologne de la Charte européenne des droits fondamentaux.

En 2007, la Pologne a obtenu, comme la Grande-Bretagne, une dérogation lui permettant d'exclure cette Charte du Traité de Lisbonne, sous la pression du parti conservateur des frères Kaczynski qui menaçait de rejeter la ratification du Traité en bloc.

Dans les sondages, 66,5% des électeurs de M. Napieralski se disent prêts à voter Komorowski au second tour, contre près de 30% pour Kaczynski.

Indépendamment de ces reports de voix, environ 60% des personnes interrogées avant le premier tour affirmaient ne pas vouloir voter Kaczynski, souligne Stanislaw Mocek, politologue de l'Académie polonaise des Sciences.

Une nette baisse de la participation en raison des vacances pourrait toutefois «brouiller les cartes. Les électeurs de M. Kaczynski sont très disciplinés», note-t-il.

Les analystes notent que la situation rappelle celle de l'élection présidentielle de 2005. Le libéral Donald Tusk était alors arrivé en tête du 1er tour, avec 3% d'avance sur Lech Kaczynski, pour finalement se faire battre par le candidat conservateur au second tour, par 54% contre 46%.