La coalition de la chancelière allemande Angela Merkel s'est déchirée cette semaine, notamment sur les questions budgétaires, au point que la question de sa survie était publiquement posée vendredi.

«Si nous parvenons à atteindre ensemble l'été, nous arriverons aussi à durer le temps de la législature», voulait-on croire au FDP. Le secrétaire général du parti, Christian Lindner, évoquait même «un noeud gordien».

Fait rarisssime, la chancelière a déprogrammé in extremis lundi une visite du président français Nicolas Sarkozy, reportée d'une semaine, la priorité étant de rallier à ses projets des députés frondeurs.

 «La coalition tiendra-t-elle trois ans?», s'interrogeait cette semaine le tabloïd Bild, peu suspect de dérive gauchiste.

L'ambiance tendue depuis les débuts du gouvernement à l'automne est devenue explosive entre la CDU-CSU et le FDP, qui en sont aux noms d'oiseaux («branquignols», «cochons sauvages», «nains tracassins»...). Mme Merkel a rappelé jeudi ses troupes au «respect».

«L'alchimie ne fonctionne pas au sein de cette coalition. Mais Angela Merkel n'a pas d'autre choix que de faire survivre l'alliance avec le FDP, sinon elle met en danger sa propre existence politique», estimait le politologue Gero Neugebauer auprès de l'AFP.

Les partenaires de la coalition se sont affrontés violemment sur les coupes à opérer dans le budget fédéral pour économiser plus de 80 milliards d'euros sur quatre ans, qui ont été annoncées lundi.

Les libéraux ont mis leur veto aux hausses d'impôts ou de TVA qu'envisageaient les conservateurs. Mme Merkel a finalement présenté un projet de budget exempt de tout nouvel impôt pour les plus fortunés, épargnant ainsi une clientèle du FDP.

La bataille s'est poursuivie autour du constructeur automobile Opel.

Mercredi soir, le ministre libéral de l'Economie Rainer Br-derle annonçait que Berlin n'apporterait pas les garanties publiques réclamées par la maison-mère américaine General Motors. Il a jugé GM assez solide pour aider seule sa filiale allemande qui emploie 25 000 salariés.

Jeudi, la chancelière clarifiait: si le gouvernement fédéral n'aide pas Opel, c'est parce qu'il n'y a «pas d'accord au sein de la coalition» sur cette question.

Les Länder (États régionaux) où sont implantés des usines Opel vont toutefois mettre la main à la poche, a-t-elle assuré, et GM peut aussi formuler une nouvelle demande d'aides fédérales au titre de la recherche automobile.

Un désaveu cinglant pour le FDP, qui bouillonne d'autant plus qu'une grande réforme de la santé présentée récemment par le ministre libéral du secteur a été enterrée par le camp conservateur -- du moins en l'état.

«Pour Mme Merkel, l'objectif est de guider son alliance gouvernementale en ménageant encore un peu le FDP jusqu'à l'élection présidentielle du 30 juin», où la majorité doit élire Christian Wulff (CDU) à la tête de l'État, souligne Gero Neugebauer.

«Pour des raisons d'image, elle doit éviter les défections dans le camp libéral», dit le politologue. Car elle a déjà été affaiblie par la démission surprise du président Horst Köhler le 31 mai et par un piètre score de sa CDU à une élection régionale en Rhénanie (ouest) fin mai.

«Après la présidentielle, elle aura moins d'égards pour le FDP», pronostique M. Neugebauer. Les conservateurs peaufineraient déjà leurs projets de hausse d'impôts, selon la presse.

Reste que la popularité de la chancelière en a encore pris un coup. Sa coalition n'obtient plus que 37% des intentions de vote.