Après l'opération séduction des électeurs, place à l'opération séduction des adversaires... Alors que les législatives de jeudi en Grande-Bretagne s'annoncent comme les plus serrées depuis des décennies, les principaux partis du pays s'affairent en coulisses pour tenter de conclure des accords et obtenir une majorité.

Si les sondages disent vrai, le scrutin pourrait déboucher sur un «Parlement suspendu», aucun parti n'ayant obtenu de majorité. Et dans un tel scénario, qui ne s'est pas produit depuis 1974, les accords conclus en coulisses pourraient déterminer qui, des trois principaux partis, gouvernera le pays.

Le Parti travailliste, qui se prépare à la défaite après 13 années au pouvoir, a tendu la main aux libéraux démocrates, qui ont effectué une poussée inattendue pendant la campagne. Mais le dirigeant du troisième parti de Grande-Bretagne, Nick Clegg, n'a pas exclu de conclure un accord avec les conservateurs.

Le chef des Tories, David Cameron, qui espère toujours remporter une majorité ou diriger un «gouvernement minoritaire», souhaitait aller en Irlande du Nord pour recueillir le soutien du Parti unioniste démocrate (DUP). Un appui qui pourrait lui suffire pour former un gouvernement, sans un adversaire plus important. Mais la fermeture de l'espace aérien irlandais mardi matin à cause du nuage de cendres volcaniques l'a contraint à reporter son voyage.

Selon un sondage publié lundi dans «The Guardian», les Tories obtiendraient 33% des suffrages, contre 28% pour les travaillistes et les libéraux démocrates. Mais cette avance est insuffisante pour remporter une majorité d'au moins 326 sièges sur 650.

Le Premier ministre Gordon Brown a déclaré mardi qu'il assumerait la défaite aux élections générales si son parti était battu, un indice de sa possible démission de la tête du parti travailliste en cas d'échec. «Si une erreur a été commise, c'est à moi d'en assumer la responsabilité», a-t-il déclaré sur la chaîne GMTV. Un candidat du Labour sur le point de perdre son siège dans l'est de l'Angleterre a estimé que Brown devait quitter le 10 Downing Street. «Gordon Brown a été le pire Premier ministre de ce pays», a lancé Manish Sood.

Dans le cadre d'un stratagème surprenant, deux ministres ont même déclaré à leurs partisans qu'ils pourraient voter pour les libéraux démocrates dans certaines circonscriptions pour empêcher les Tories d'obtenir la majorité. «Je pense qu'il est important que les gens agissent de façon intelligente dans cette élection», a souligné le ministre gallois Peter Hain. «Mon objectif ultime, c'est d'obtenir un Parlement qui mène des réformes politiques, avec un Labour allié aux libéraux démocrates et d'autres qui veulent réformer le système politique de haut en bas», a-t-il justifié.

Avec le ministre de l'Education Ed Balls, il a appelé les libéraux démocrates à soutenir les candidats travaillistes dans les circonscriptions où leurs candidats ont peu de chances de l'emporter.

Jusqu'à présent, Nick Clegg a refusé de dire avec quel adversaire il pourrait s'allier. S'il semble avoir davantage de points communs avec les travaillistes, il a sous-entendu qu'il soutiendrait tout partenaire acceptant ses demandes pour une réforme du système politique britannique, ainsi qu'une refondation de l'économie et une réduction des impôts pour les faibles revenus.

Clegg souhaite obtenir une réforme du mode de scrutin et l'instauration de la proportionnelle, à laquelle David Cameron est opposé. Mais il a assuré ce ne serait pas une condition préalable à des discussions. «Je n'ai jamais parlé de préconditions», a-t-il déclaré à GMTV. «J'ai toujours parlé des choses pour lesquelles je veux me battre, les changements pour lesquels je veux me battre».