Le premier ministre François Fillon a annoncé jeudi soir à Nantes, à l'occasion d'un meeting de soutien à l'UMP pour les régionales, qu'un projet de loi serait déposé «au printemps» pour interdire en France le port du voile intégral.

«Toutes les confessions sont respectables, ce qui ne l'est pas, c'est le prosélytisme agressif, le repli communautaire», a lancé M. Fillon. Il s'exprimait à trois jours du premier tour des élections régionales, lors d'une réunion publique devant un millier de personnes.

La «pratique du port du voile intégral heurte notre conception ouverte de la vie sociale. Le voile intégral est contraire aux principes fondamentaux d'égalité entre hommes et femmes. En démocratie, on ne vit pas masqué. C'est la raison pour laquelle au printemps, nous allons légiférer pour interdire ces pratiques d'un autre âge», a commenté M. Fillon. La France est une république où «chaque citoyen doit donner à son pays autant qu'il reçoit de lui», a-t-il souligné.

Fin janvier, le premier ministre a demandé au Conseil d'État d'étudier «les solutions juridiques permettant de parvenir à une interdiction du port du voile intégral», et de lui remettre ses propositions «avant la fin du mois de mars».

Dans son rapport remis en janvier, la mission d'information parlementaire sur le port du voile intégral n'a pas préconisé de loi d'interdiction générale dans l'espace public. Elle a en revanche préconisé une interdiction du voile intégral dans les services publics et les lieux d'accueil du public (ce qui inclut les transports, les écoles, les hôpitaux mais aussi les banques et la poste).

François Fillon, dans sa lettre fin janvier au Conseil d'État, a souligné la «complexité juridique» de la question mise en lumière par les conclusions de la mission parlementaire.

Si l'interdiction du voile intégral «pourrait être affirmée dans le cadre d'une résolution parlementaire», le premier ministre estimait alors que le gouvernement ne peut pas «faire l'économie d'une intervention du législateur» pour traduire l'idée que «le voile intégral n'est pas acceptable dans notre République» car «contraire au principe d'égalité entre les hommes et les femmes ainsi qu'à notre conception de la dignité humaine».

Le chef du gouvernement jugeait toutefois nécessaire dans cette lettre la «recherche d'un consensus républicain» sur le cadre juridique entourant cette pratique. Il estimé également «essentiel de mener la réflexion dans des conditions prévenant tout risque d'interprétation qui blesserait nos compatriotes de confession musulmane».

Yazid Sabeg, commissaire à la Diversité et à l'égalité des chances, avait quant à lui estimé en février qu'une loi interdisant le voile intégral serait «une erreur politique».

«Mobiliser le Parlement en faveur d'une loi, du reste difficile à appliquer, sera vécu comme une initiative stigmatisante et de circonstance parce que le télescopage entre burqa et islam est mécanique», soulignait M. Sabeg dans un entretien au Parisien/Aujourd'hui en France. «Ce serait une erreur politique.»

Il se déclarait toutefois opposé au port du voile intégral, soulignant que «la posture signifiée par ce vêtement est régressive et transgressive. Elle mystifie l'opinion sur l'islam et stigmatise la population musulmane dans son ensemble», expliquait-il, jugeant que «c'est une provocation et c'est aussi un piège tendu à l'opinion».