Londres, Berlin, Paris et Dublin ont haussé le ton jeudi, en vain pour le moment, face à Israël auquel ils réclament des explications dans l'affaire des faux passeports utilisés au moment de l'assassinat d'un cadre du Hamas à Dubaï, que l'Emirat attribue au Mossad.

Les représentants diplomatiques d'Israël en Grande-Bretagne, en Allemagne, en France et en Irlande ont tous été reçus au ministère des Affaires étrangères de leurs pays d'accueil respectifs.

L'ambassadeur Ron Prosor s'est ainsi entretenu vingt minutes avec le secrétaire général du Foreign Office Peter Ricketts. A l'issue de la rencontre, il a indiqué n'avoir «pas été en mesure d'apporter des informations complémentaires».

Convoqué au même moment, son homologue à Dublin, Zion Evrony, a tenu des propos similaires, déclarant «ne rien savoir de cet événement».

«On lui a souligné que, quels que soient les responsables, le gouvernement (irlandais) considérait hautement regrettable la contrefaçon et le détournement de passeports irlandais (...) de nature à mettre potentiellement en danger les citoyens irlandais voyageant à l'étranger», a indiqué un porte-parole du ministère irlandais, après la réunion d'une heure.

La police de Dubaï a affirmé que six membres du commando qui a assassiné l'un des fondateurs de la branche armée du mouvement islamiste palestinien, Mahmoud Abdel Raouf Al-Mabhouh, le 20 janvier dans un hôtel de Dubaï, détenaient des passeports britanniques. Trois avaient des passeports irlandais, et les deux derniers un français et un allemand.

Le chef de la police de Dubaï, le général Dhahi Khalfan, s'est dit «certain à 99%, sinon à 100%» de la responsabilité du Mossad, les services secrets israéliens.

Israël a jusqu'ici entretenu l'ambiguïté sur son implication, refusant d'apporter un démenti formel.

Après la rencontre entre MM. Prosor et Ricketts, le ministre britannique des Affaires étrangères David Miliband a dit «espérer et attendre» qu'Israël «coopère pleinement avec l'enquête» annoncée la veille par le Premier ministre britannique Gordon Brown.

«Nous voulons offrir à Israël toutes possibilités d'échanger avec nous ce qu'il sait de cet incident», a indiqué M. Miliband, précisant qu'il rencontrerait son homologue israélien Avigdor Lieberman lundi à Bruxelles.

«Nous devons connaître les faits (...) et nous devons savoir ce qui est arrivé aux passeports britanniques. C'est aussi simple que cela», a pour sa part déclaré le Premier ministre Gordon Brown.

L'Allemagne a également demandé des comptes jeudi au chargé d'affaires israélien à Berlin, estimant «urgent (...) d'éclaircir totalement les circonstances de la mort de Mahmoud Al-Mabhouh», selon un communiqué diffusé après la rencontre.

La France a ajouté à la pression sur l'Etat hébreu en demandant «des explications» à Sammy Ravel, chargé d'affaires d'Israël à Paris. Le ministère des Affaires étrangères «a exprimé la profonde préoccupation de la France quant à l'utilisation malveillante et frauduleuse» d'un «document administratif français», a déclaré un porte-parole.

Selon la presse israélienne, le commando a vraisemblablement usurpé l'identité d'au moins sept Israéliens détenteurs d'une double nationalité.

Les relations entre le Royaume-Uni et Israël ont par le passé déjà souffert des actions des services secrets israéliens, notamment après l'enlèvement en 1986 à Rome et le transfert en Israël de Mordehaï Vanunu, qui avait révélé l'existence de la centrale nucléaire de Dimona (sud d'Israël) au Sunday Times.