La ministre française de la Justice, Michèle Alliot-Marie, a assuré dimanche n'avoir donné «aucune instruction» pour que le parquet fasse appel de la relaxe de Dominique de Villepin dans l'affaire Clearstream, alors que les soupçons inverses ont mis le pouvoir sur la défensive.

Le procureur de la république Jean-Claude Marin, qui a annoncé vendredi qu'il interjetait appel de la relaxe prononcée la veille à l'égard de M. de Villepin, «n'a eu ni instruction ni incitation de quelque nature que ce soit pour prendre sa décision», a dit Mme Alliot-Marie à la radio Europe 1.

L'ancien premier ministre, qui a été blanchi jeudi par la justice dans cette affaire de dénonciation calomnieuse dans laquelle Nicolas Sarkozy s'était porté partie civile, a accusé vendredi le président français d'être à l'origine de cet appel du parquet, pour le «traîner dans la boue».

Un soupçon exprimé également par des membres de l'opposition, et relayé par la presse.

Mme Alliot-Marie a nié avoir reçu des consignes de la présidence. Elle a indiqué ne pas avoir «entendu parler» d'une réunion organisée jeudi à l'Élysée, au cours de laquelle, selon M. de Villepin, la décision de faire appel aurait été prise.

Le procureur a lui-même défendu l'indépendance de sa décision dans le journal Le Monde daté de dimanche.

Dans le même journal, l'ancien ministre socialiste de la Justice et ex-président du Conseil constitutionnel Robert Badinter, estimait «évident» que dans le cas de M. de Villepin, la décision n'avait pas été prise «sans l'accord -sinon à l'initiative- de la Chancellerie et de l'Élysée».

Le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, un proche de M. Sarkozy, avait pour sa part justifié samedi soir, sur la chaîne privée TF1, la décision du parquet, sans laquelle «le débat n'aurait pas été complet».

«Je pense qu'il faut d'abord penser aux victimes (...), des personnes dont les noms ont été jetés dans des fichiers» de comptes occultes de la société financière luxembourgeoise Clearstream, et parmi lesquelles Nicolas Sarkozy figure «au premier rang», a dit M. Hortefeux.

L'épouse du président français, Carla Bruni-Sarkozy, s'est elle-même indignée samedi des soupçons d'instrumentalisation de la justice émis contre son mari.

«Je suis stupéfaite par ce genre d'allégations», a-t-elle déclaré à l'antenne de la radio RTL, se disant également «très étonnée par le peu de confiance accordée par M. de Villepin et les médias dans la justice française».

Dominique de Villepin a été relaxé jeudi dans cette affaire, une vaste machination politique fondée sur des falsifications de listings bancaires qui aurait eu pour but de discréditer Nicolas Sarkozy en insinuant des faits de corruption, dans la course à la présidence française, avant son élection en 2007.

Peu après le jugement, une défaite personnelle pour le président français, celui-ci avait «pris acte» de la relaxe de son rival et signifié qu'il ne ferait pas appel en sa qualité de partie civile.