Alors que plusieurs pays européens dont la France envisagent d'interdire le voile islamique intégral, le Royaume-Uni reste attaché à la liberté d'expression des convictions religieuses en matière vestimentaire mais un parti anti-européen fait campagne pour son bannissement.

Une mission parlementaire française doit rendre mardi un projet de résolution sur une éventuelle interdiction légale du port du voile islamique intégral dans les lieux publics. Cela concerne le niqab -les yeux sont apparents- et la burqa, où le visage est entièrement caché.

«Le gouvernement britannique ne partage pas la position de la France sur la sécularisation», ont rappelé vendredi les autorités britanniques sur le site internet de Downing street, en réponse à une pétition électronique.

Aucune loi n'interdit le port du voile intégral au Royaume-Uni. Il est, comme le simple foulard islamique (hijab), admis partout. Selon le Conseil des musulmans de Grande-Bretagne (CMB), le pays compte au total plus de 2,5 millions de musulmans et moins de 1% des musulmanes résidant dans le pays portent un niqab ou une burqa.

Elles seraient moins de 2 000 en France, selon les chiffres officiels.

«Au Royaume-Uni, nous sommes à l'aise avec l'expression des convictions, que ce soit le port du turban, du hijab, du crucifix ou de la kippa.Cette diversité est une partie importante de notre identité nationale et l'une de nos forces», a précisé le gouvernement.

Cette position ne fait pas consensus au sein de la classe politique: elle est notamment rejetée par le parti pour l'indépendance du Royaume-Uni (UKIP), grand vainqueur des élections européennes de 2009 en terminant en deuxième place devant le Labour au pouvoir.

Son ancien président, le député européen Nigel Farage, a annoncé le 17 janvier que l'UKIP faisait de l'interdiction du voile islamique intégral «dans les lieux et les bâtiments publics» un thème de campagne pour les législatives prévues d'ici juin.

Le voile intégral «est le symbole de quelque chose destiné à opprimer les femmes, c'est le symbole d'un Royaume-Uni de plus en plus divisé et, le vrai souci, est que (...) beaucoup de nos villes deviennent des ghettos», a déclaré M. Farage à l'AFP, soulignant que des fillettes de 4 ans portaient le niqab à l'école.

«Je ne peux pas entrer dans une banque avec un casque de moto. Je ne peux pas porter de cagoule dans le métro», a-t-il noté, rejetant les accusations selon lesquelles l'UKIP tente de prendre des voix au parti d'extrême droite britannique (BNP).

Mais pour le CMB et la Société islamique du Royaume-Uni, le port du voile intégral relève d'un choix.

«En tant qu'imam, je dis aux jeunes que dans l'islam, ce n'est pas une obligation de se couvrir le visage (...). Au final, c'est un choix individuel que nous devons respecter», a expliqué à l'AFP Ajmal Masroor, imam et porte-parole de la Société islamique.

«Au nom de la laïcité et du laïcisme, (la France) est devenue un (pays) extrémiste laïc», a-t-il relevé.

Le voile islamique a déjà agité la scène politique britannique: en octobre 2006, le ministre des Relations avec le parlement --aujourd'hui ministre de la Justice-- Jack Straw s'était dit «gêné» de parler à quelqu'un sans voir son visage, lançant une courte polémique.

Tony Blair, alors Premier ministre, avait qualifié le niqab de «marque de séparation» entre les musulmans et le reste de la société. 33% des Britanniques s'étaient dit favorables à son interdiction dans tous les lieux publics.

Après plusieurs procès médiatisés, le ministère de l'Education a publié en mars 2007 des directives autorisant les directeurs d'écoles publiques et confessionnelles à interdire le niqab.