L'offre de services gratuits des prostituées aux délégués de la conférence climat ne fait pas recette, mais l'afflux de jeunes femmes d'Europe de l'Est à Copenhague a relancé le débat sur la prostitution au royaume du Danemark, seul à la tolérer parmi les pays nordiques.

La présence annoncée de plus de trente mille visiteurs du monde entier a incité de nombreuses prostituées à gagner la capitale danoise, selon les autorités: «Nous avons constaté un afflux de prostituées venues notamment des pays de l'Est dans les rues de Copenhague» indique le commissaire Lars-Christian Borg, qui souligne au passage que le plus vieux métier du monde «n'est pas interdit au Danemark». Ses troupes, fortement mobilisées pour assurer la sécurité du sommet, feront «cependant tout leur possible pour maintenir la loi et l'ordre dans les quartiers chauds et pourchasser les proxénètes», dit-il.

De son côté, la maire de Copenhague, Ritt Bjerregaard (social-démocrate) avait pris les devants avant l'ouverture de la réunion internationale en adressant une lettre aux hôteliers de la ville, les exhortant à «ne pas faciliter le contact entre leurs clients et les prostituées».

Son message était accompagné d'un envoi de cartes postales destinées à la clientèle des établissements, avec pour slogan «Soyez responsable: n'achetez pas de sexe!».

Cette démarche a été particulièrement mal reçue par les professionnelles: en signe de protestation contre cette campagne qu'elle juge «discriminatoire», la seule association danoise des travailleuses de sexe, SIO, offre gracieusement depuis samedi dernier les services de ses 85 membres aux délégués venus du monde entier.

Pour le moment, l'offre n'a pas suscité l'engouement escompté: «Nous avons reçu quatre demandes à ce jour mais notre offre tient toujours», indiquait vendredi Susanne Moeller, une ancienne infirmière devenue présidente de SIO pour défendre les intérêts de sa profession «soumise à la TVÀ et à l'impôt sur le revenu».

Elle explique ce manque d'enthousiasme par le fait que «les candidats doivent s'inscrire sur notre site et décliner leur identité de délégué à la conférence pour bénéficier de notre générosité. Ce qui a pu en décourager un grand nombre».

Sept hôtels ont décidé de leur propre chef de mener campagne contre la prostitution, à l'initiative de l'Hotel Guldsmeden (l'orfèvre), situé sur Helgolandsgade, l'une des rues chaudes de Copenhague.

«Le milieu est devenu plus dur et les prostituées sont de plus en plus jeunes, jusqu'à 16 ans selon la police», souligne Kirsten Skovgaard, responsable de la communication du Guldsmeden.

Une bannière a été déployée sur une façade de Helgolandsgade: «No more Trafficking, Drug-dealing, Abuse, Fear», pour signaler qu'on «en a assez d'être témoins de ce trafic de sexe insupportable sous nos fenêtres», insiste Mme Skovgaard.

Seul pays de la région à tolérer le commerce des corps, le Danemark compte près de 6.000 prostituées travaillant dans les clubs et les rues, dont quelque 2.500 étrangères estimées, venues d'Europe de l'Est et d'Afrique.

Les Danoises sont parfois étudiantes, employées ou mères de famille et travaillent souvent par intermittence, selon Mme Moeller.

Au Waterloo, l'une des boites de strip-tease les plus courues de Copenhague où chaque soir le champagne coule à flots, servi par des belles de nuit, «les retombées (de la conférence), se ressentent déjà», assure Maria, la gérante.