Le premier ministre russe, Vladimir Poutine, a annoncé tard jeudi soir un compromis avec Kiev sur l'épineux dossier gazier et a fait l'éloge de son homologue ukrainienne Youlia Timochenko, à l'issue de négociations avec elle à Yalta (sud de l'Ukraine).

«Le Premier ministre a posé une série de questions liées à la crise. Nous avons jugé possible d'accéder à ses désirs et de corriger les accords» conclus auparavant, a déclaré M. Poutine lors d'une conférence de presse conjointe avec Mme Timochenko.

La Russie a notamment accepté de réduire les volumes du gaz devant être acquis par Kiev sans imposer de pénalités, a-t-il annoncé alors que selon la présidence ukrainienne ces sanctions pourraient atteindre 8,5 milliards de dollars en 2009.

Mme Timochenko, dont le pays frappé de plein fouet par la crise économique mondiale a du mal à régler sa facture gazière à la Russie a dit «apprécier» la décision de Moscou.

M. Poutine a aussi indiqué que le tarif payé par Moscou pour le transit de son gaz vers l'Europe via l'Ukraine allait augmenter de 60% l'an prochain.

Le président ukrainien Viktor Iouchtchenko a averti plus tôt dans la journée que le transit vers l'Europe via l'Ukraine serait de nouveau menacé si Kiev et Moscou ne révisaient pas les contrats gaziers signés en janvier, dans un message à son homologue russe Dmitri Medvedev.

Début janvier, les Européens avaient déjà subi une longue interruption des livraisons russes au beau milieu de l'hiver, en raison d'un conflit gazier ukraino-russe. Un quart du gaz consommé dans l'UE provient de Russie, dont 80% transitent par l'Ukraine.

Signe inquiétant pour l'Europe, M. Poutine avait déjà averti le 11 novembre que son pays réduirait ses livraisons de gaz à l'Europe via l'Ukraine si celle-ci en prélevait illégalement sans régler sa facture.

Les propos tenus jeudi par M. Iouchtchenko ont provoqué une vive réaction du Kremlin, qui les a qualifiés du «chantage politique», selon l'expression du conseiller diplomatique de M. Medvedev.

Si M. Iouchtchenko, un fervent pro-occidental, est frappé par l'ostracisme de la Russie, M. Poutine et Mme Timochenko ont maintes fois affiché des rapports plutôt amicaux.

Cela a valu a Mme Timochenko, jugée pro-européenne mais dont l'orientation reste floue, d'être accusée par ses critiques d'accords politiques secrets avec Moscou.

A Yalta, Vladimir Poutin a fait l'éloge de son homologue au risque d'être accusé de nouveau d'ingérence dans les affaires intérieures de l'Ukraine, alors que Mme Timochenko est une des favoris de la présidentielle prévue le 17 janvier.

«Nous nous sentons en plein confort en travaillant avec le cabinet Timochenko», a déclaré M. Poutine.

«Pour la première fois ces dernières années, l'Ukraine honore tous ses engagements, pleinement et avec conséquence. Cela constitue un facteur considérable de la stabilité énergétique en Europe», a-t-il poursuivi, soulignant qu'il devait en «rendre justice au gouvernement ukrainien».

La rencontre de Yalta ne doit pas être considérée comme un soutien à la candidature de Mme Timochenko, a assuré la veille le conseiller diplomatique du Premier ministre russe, Iouri Ouchakov.

Lors de la précédente présidentielle en 2004, le Kremlin avait ouvertement soutenu le candidat du pouvoir, Viktor Ianoukovitch, réputé pro-russe. M. Poutine, alors président, s'était alors rendu à deux reprises en Ukraine pendant la campagne électorale.

M. Ianoukovitch apparaît comme le favori de la prochaine élection avec 41% d'intentions de vote, devant Mme Timochenko (25%), selon un récent sondage. Le président sortant est loin derrière avec 4%.