La suggestion du ministre français de l'Intérieur Brice Hortefeux d'imposer un couvre-feu pour les délinquants de moins de 13 ans a soulevé mercredi la colère de l'opposition et le scepticisme de policiers et de magistrats qui la jugent «inapplicable».

«On se moque du monde», a commenté la dirigeante socialiste Martine Aubry, selon laquelle «ce ne sera jamais que le 23e texte sorti par le gouvernement sur la sécurité» depuis 2002, date de retour de la droite aux affaires avec comme ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy, élu en 2007 président de la République. La présidente du Syndicat de la magistrature (SM, classé à gauche) Emmanuelle Perreux tient la proposition du ministre pour «totalement inapplicable», jugeant que celle-ci s'inscrit «une fois de plus dans une politique répressive».

Hélène Franco, ex-juge des enfants, la qualifie d'«incantatoire et de démagogique». La magistrate pose la question: «Comment reconnaître les enfants délinquants dans la rue?»

Du côté de la police, les syndicats s'interrogent sur les modalités d'application de cette mesure censée contribuer à la lutte contre la délinquance, érigée en priorité par M. Sarkozy.

«C'est inapplicable», estime un délégué policier, Nicolas Comte, «car le gouvernement s'est engagé dans une diminution des effectifs» de police.

«C'est une idée séduisante mais comment va-t-on faire pour l'appliquer?» et «avec quels moyens?», renchérit Jean-Claude Delage, du syndicat Alliance en évoquant lui aussi une «réduction d'effectifs» et une «surcharge de missions» pour la police.

«C'est une mesure de bon père de famille qui va rassurer la population» mais «il faut nous donner les moyens, notamment juridiques, de pouvoir l'appliquer», a ajouté Patrice Ribeiro, de Synergie.

La délinquance est repartie à la hausse pour la première fois depuis 2002 en France, selon un bilan portant sur le premier semestre 2009. La part des mineurs a augmenté de près de 5% en un an, pour atteindre 18%, et prend une forme «de plus en plus violente», selon M. Hortefeux.