L'avocat du chef de l'État français au procès Clearstream a pilonné lundi Dominique de Villepin, affirmant que l'ex-premier ministre était l'instigateur de la machination destinée à déstabiliser Nicolas Sarkozy dans sa course à la présidence de 2007.

«M. de Villepin a été l'instigateur, il a été à l'origine de cette machination courant 2004 qui a eu pour effet de tenter d'empêcher Nicolas Sarkozy d'accéder à la présidence de l'UMP», le parti de droite au pouvoir, a affirmé Me Thierry Herzog à l'issue de quatre heures de plaidoiries.

Au début de cette longue plaidoirie il s'était pourtant montré moins catégorique, ne parlant que d'une «complicité» avec les deux faussaires présumés, Jean-Louis Gergorin, ex-vice président du groupe aéronautique EADS, et le mathématicien Imad Lahoud.

Le chef de l'État, fait rarissime, s'est porté partie civile dans cette affaire. Une démarche, dénoncée par la défense au nom de l'équité de la justice, qui signifie en droit français qu'il fait valoir ses droits de victime au procès.

M. de Villepin encourt 5 ans de prison et joue sa carrière politique dans cette affaire où il est accusé de «complicité de dénonciation calomnieuse» au détriment de Nicolas Sarkozy. Les deux hommes se côtoyaient à l'époque au gouvernement mais étaient rivaux à la veille de la présidentielle de 2007 pour prendre la succession de Jacques Chirac.

L'affaire avait éclaté bien avant l'élection de 2007, contribuant au final à disqualifier Dominique de Villepin en raison des soupçons qui pesaient sur lui.

Des noms de personnalités, dont celui de M. Sarkozy, avaient été ajoutés sur des listings bancaires de l'institution financière luxembourgeoise Clearstream, ensuite transmis à la justice. Il s'agissait de les discréditer en faisant croire qu'elles détenaient des comptes occultes et avaient perçu des pots de vins dans une vente d'armements.

Jean-Louis Gergorin, a affirmé avoir remis les faux listings à la justice en connaissance de cause, et sur ordre de Dominique de Villepin. Le mathématicien Imad Lahoud a reconnu les avoir confectionnés. Un ancien responsable des services secrets, le général Rondot, a également témoigné en ce sens.

«Courant 2004, et à partir d'avril 2004, la conviction qui est la mienne est que tant Jean-Louis Gergorin, Imad Lahoud que Dominique de Villepin se sont entendus, se sont associés» pour mettre au point la machination, a poursuivi l'avocat de Nicolas Sarkozy, un ténor du barreau qui est aussi un ami de longue date du président français.

Il a également affirmé qu'«aucun de ceux qui sont ici ne sont ici par l'acharnement d'un homme». Dominique de Villepin avait employé ces termes au premier jour du procès pour dénoncer «l'acharnement» de Nicolas Sarkozy contre lui.

Dans un «lapsus» fin septembre, M. Sarkozy avait en retour qualifié de «coupables» les prévenus de ce procès hors normes.

Ayant déclenché un concert de protestations pour avoir bafoué la présomption d'innocence, il a admis la semaine dernière qu'il aurait été «mieux inspiré» de «s'abstenir de tout commentaire». La vérité «est en train d'éclater», a-t-il cependant ajouté.

Mardi après-midi auront lieu les réquisitions du parquet.

Suivront le lendemain les plaidoiries de la défense, dont celles des quatre avocats de M. de Villepin. Puis, jeudi et vendredi, celles des défenseurs des quatre autres personnes poursuivies: M. Gergorin, Imad Lahoud, le journaliste Denis Robert et l'auditeur Florian Bourges.

La décision du tribunal devrait être mise en délibéré à début 2010.