L'ex-premier ministre français Dominique de Villepin et ses quatre co-prévenus au procès Clearstream disposent d'une dernière journée lundi avant les plaidoiries pour convaincre le tribunal qu'ils n'ont pas trempé dans cette affaire de dénonciation calomnieuse.

Durant la première semaine, le procès s'était plus déroulé hors les murs que sous les ors du tribunal, Dominique de Villepin et son ancien rival Nicolas Sarkozy, qu'il est soupçonné d'avoir voulu déstabiliser avant la présidentielle de 2007, s'affrontant par médias interposés.

M. de Villepin avait dénoncé «l'acharnement» du président contre lui; M. Sarkozy a fait scandale en parlant de «coupables» au mépris de la présomption d'innocence.

Mais la semaine passée le combat a réintégré le prétoire.

M. de Villepin a vu sa défense mise à mal par le général Rondot, un ancien responsable du renseignement dont les carnets personnels, saisis durant la procédure, accablent l'ex-premier ministre.

Celui-ci a toujours nié être impliqué dans cette manipulation, dans laquelle des noms de personnalités, dont celui de M. Sarkozy, avaient été ajoutés sur des listings bancaires afin de les discréditer en faisant croire qu'elles détenaient des comptes occultes.

Mais si ce témoignage a clairement établi que Dominique de Villepin ne disait pas toute la vérité dans cette affaire, il ne permet pas de déduire qu'il avait demandé à son co-prévenu, l'ancien vice-président du groupe aéronautique EADS Jean-Louis Gergorin, de fournir à la justice les listings Clearstream, ni qu'il savait que ces listings étaient des faux.

Or pour qualifier le délit de «complicité de dénonciation calomnieuse», le tribunal doit acquérir la certitude que le prévenu savait bien que les listings étaient des faux.

La stratégie du mathématicien Imad Lahoud semble elle avoir fait long feu, le prévenu étant sorti mal en point de la confrontation. Il lui sera difficile désormais de démontrer qu'il n'a pas participé à la falsification des listings comme il l'affirme.

Lundi sera la dernière occasion pour lui et ses co-prévenus de faire évoluer le sentiment du tribunal. Dès mardi débuteront en effet les plaidoiries des parties civiles, avec en point d'orgue celle de l'avocat de M. Sarkozy, Me Thierry Herzog, lundi 19 octobre, puis le réquisitoire mardi 20. À l'issue des plaidoiries de la défense, le jugement devrait ensuite être mis en délibéré à début 2010.

Lundi devrait notamment avoir lieu l'audition de plusieurs parties civiles et notamment de Philippe Delmas, ancien vice-président d'Airbus (groupe EADS), seul à avoir été placé en garde à vue dans cette affaire. Il pourrait permettre de mieux comprendre le rôle de Jean-Louis Gergorin.

Mais ce sont surtout les derniers témoins qui pourraient créer la surprise. Notamment l'ancien patron des Renseignements généraux --ex-service de renseignement policier--, Yves Bertrand.

Imad Lahoud a affirmé avoir ajouté début 2004 dans les listings Clearstream le nom de Nicolas Sarkozy depuis le bureau d'Yves Bertrand. Celui-ci affirme de son côté être étranger à cette affaire.

Fourbissant sa plaidoirie, Me Olivier Metzner, l'un des avocats de Dominique de Villepin, a de nouveau dénoncé vendredi une «ingérence de l'appareil d'État» dans le procès Clearstream, où M. Sarkozy s'est porté partie civile.

L'ancien premier ministre, dont la rivalité avec Nicolas Sarkozy avait éclaté alors que tous deux faisaient partie d'un même gouvernement, risque dans cette affaire jusqu'à 5 ans de prison et 45 000 euros d'amende.