Depuis le printemps dernier, le premier ministre italien Silvio Berlusconi reçoit une tuile après l'autre. Les médias ont fait leurs choux gras de sa présence au 18e anniversaire d'une jeune femme soupçonnée d'avoir eu une liaison avec lui et de révélations sur la présence de prostituées dans des fêtes à ses résidences. Cette semaine, le plus haut tribunal du pays a levé l'immunité judiciaire que Berlusconi s'était lui-même accordée grâce à une loi adoptée immédiatement après son élection en 2008. Malgré tout, près d'un Italien sur deux lui fait toujours confiance.

Cette semaine, Silvio Berlusconi a ajouté un nouveau nom à la longue liste de ses ennemis: Giorgio Napolitano, le président italien.

 

Son attaque verbale contre le président («on sait de quel côté il est», a-t-il lancé, faisant référence au passé communiste de Napolitano) constitue un nouveau sommet dans la croisade de Berlusconi contre les institutions italiennes.

«La base de Berlusconi lui est fidèle envers et contre tout parce qu'elle est d'abord anticommuniste», explique Franco Pavoncello, politologue et recteur de l'Université John Cabot à Rome. «Mais son attaque contre le président montre qu'il est nerveux. Je vois mal ce que ça peut lui apporter, et c'est une première dans ce pays.»

Depuis un an, l'indice de confiance du premier ministre italien est certes descendu, de 60% à 47% selon les sondeurs. Mais il s'agit d'une baisse modérée compte tenu des nombreux scandales: inaction après le tremblement de terre de L'Aquila, affaires de moeurs avec une mineure et des prostituées, puis, cette semaine, la levée de son immunité judiciaire, qui aura pour effet la reprise de procès à son encontre.

«Berlusconi demeure une figure de modernité dans ce pays, explique M. Pavoncello. C'est lui qui est responsable de l'introduction de la télévision commerciale en Italie, voire même en Europe. Avant les années 80, la télévision publique était d'un ennui total. Je m'en souviens parce que j'ai fait toutes mes études aux États-Unis, à Chicago.»

L'un des thuriféraires de Berlusconi, l'éditeur du petit quotidien romain Il Foglio, Giuliano Ferrara, expliquait récemment que Berlusconi correspond exactement à la tendance de l'«individualisme expressif», inventée par un chroniqueur du New York Times pour expliquer la vogue de l'autoglorification.

«Si Berlusconi a parfois un ego digne de l'asile, ce n'est pas parce qu'il est fou, mais moderne», concluait M. Ferrara.

L'autre raison de la fidélité de son électorat, selon M. Pavoncello, c'est qu'il donne des garanties cruciales à des clientèles bien ciblées. «Les autonomistes de la Lega Nord (Ligue du Nord) sont gagnés par ses mesures populistes anti-immigration, même si elles risquent d'être annulées par l'Europe. Et les petits entrepreneurs de la droite n'ont qu'un objectif, tenir les communistes loin du gouvernement, parce qu'ils les voient comme les inventeurs de la bureaucratie qui paralyse tout en Italie.»

L'hebdomadaire britannique The Economist, qui est très critique envers Berlusconi, a proposé une autre explication cet été: les Italiens votent pour lui parce qu'ils savent qu'il assouplira les lois fiscales. Justement, une loi d'amnistie fiscale vient d'être votée, qui permet aux citoyens ayant caché des revenus à l'étranger de ne payer que 5% d'impôt, près de dix fois moins que le taux normal.

«Les gouvernements Berlusconi ont fait trois amnisties fiscales depuis 2001», tonne Elio Lannutti, un sénateur de l'opposition du parti Italia dei Valori (L'Italie des valeurs), fondé par le juge anticorruption Antonio di Pietro. «Il est au pouvoir parce que les Italiens ne veulent pas payer leurs impôts.»

Cela dit, l'ère Berlusconi pourrait toucher à sa fin. Même s'il blaguait récemment qu'il se sentait de l'âge de 37 ans plutôt que de 73, il sera probablement trop vieux pour mener la droite aux élections de 2013, selon M. Pavoncello. «La question des escortes signifie qu'il doit faire une croix sur la présidence, un poste honorifique mais réservé aux personnes à la moralité hors de tout doute. Et son style de personnalité politique convient mal à un octogénaire.»

 

 

«Il est jeune, beau et bronzé.»

Commentaire sur l'élection de Barack Obama, lors d'un voyage en Russie en novembre 2008.

«Je vous amène les saluts d'un monsieur bronzé, Barack Obama. Et je peux vous dire qu'il n'était pas seul quand il a pris du soleil, parce que son épouse aussi est bronzée.»

Commentaire sur Michelle Obama, au retour du G20 de Pittsburgh en septembre 2009.

«Attention à ce que vous écrivez, je vous rappelle que se tiennent ces jours-ci chez moi les réunions à propos de la Rai (le réseau de télévision publique).»

S'adressant aux journalistes en avril 2009

«La majorité des Italiens voudrait être comme moi.»

Lors d'une entrevue télévisée en septembre 2009.

«Beaucoup de touristes étrangères ont réservé des voyages chez nous l'an prochain.»

En réponse à la question d'un journaliste espagnol sur la présence d'escortes à sa résidence officielle, en septembre 2009.

«Vous êtes le plus beau cadeau que Dieu a donné à nous les hommes.»

En réponse à la question d'une journaliste espagnole sur sa conception de la femme, en septembre 2009.

Sources : La Repubblica, Il Corriere della Sera, Mattino Cinque.