Le ministre français de la Culture Frédéric Mitterrand, au coeur d'une polémique depuis trois jours, semblait avoir sauvé sa tête vendredi, après s'être défendu de toute «apologie» du tourisme sexuel et de la pédophilie.

Le porte-parole du Parti socialiste Benoît Hamon, qui a pris «acte» de ses explications, ne réclamait plus la démission de Frédéric Mitterrand qui a par ailleurs fait une apparition publique remarquée, vendredi, en compagnie du président Nicolas Sarkozy à l'inauguration d'une exposition sur la Turquie à Paris. Contraint de s'expliquer après des appels à la démission venus de l'extrême droite puis d'une partie de la gauche, Frédéric Mitterrand a affirmé jeudi soir à la télévision que son livre n'était «en aucun cas une apologie du tourisme sexuel» ni «de la pédophilie».

Il a soutenu que son livre, «La mauvaise vie», au coeur du scandale, n'était «pas un récit totalement autobiographique». Dans un des chapitres de cet ouvrage, paru en 2005 sans avoir suscité la moindre controverse, le narrateur relate des expériences sexuelles avec des «garçons» prostitués en Thaïlande.

«Je condamne le tourisme sexuel qui est une honte, je condamne la pédophilie à laquelle je n'ai jamais participé d'aucune manière», a-t-il affirmé, déclarant qu'il n'avait «jamais» envisagé de démissionner et qu'il conservait «la confiance» du président.

«Dont acte, c'était une déclaration qui était attendue de la part d'un ministre qui a longtemps entretenu l'ambiguïté sur ce sujet dans les déclarations qu'il avait faites autour de son livre», a sobrement déclaré vendredi Benoît Hamon, tout en estimant que l'affaire laisserait des «traces».

Son collègue socialiste, Arnaud Montebourg, a cependant jugé les explications de Frédéric Mitterrand «laborieuses» et «narcissiques».

Dans la majorité de droite, le chef du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale Jean-François Copé a estimé que le ministre avait été «émouvant». Mais «il est fort probable que l'opinion publique, pour une part d'entre elle, vive négativement cette période», a-t-il ajouté.

La Presse française a souligné vendredi dans son ensemble la «sincérité» d'un homme de culture et de télévision de 62 ans, venu «défendre (son) honneur», mais elle restait partagée quant au fond de l'affaire.

«Si le ministre de la Culture n'a pas menti sur l'âge de ses partenaires sexuels, le lynchage dont il a été victime est une tache sur tous ceux qui ont hurlé avec les loups», a jugé le quotidien Le Monde.

Le quotidien catholique La Croix a rappelé que la question n'est pas celle de l'homosexualité revendiquée du ministre mais bien «de savoir s'il a eu des relations avec des mineurs», ce que l'intéressé a nié.

Or c'est précisément cette «impunité» supposée des élites politico-culturelles en France qui avait déclenché les premières attaques du Front national (extrême droite) contre le ministre.

L'offensive contre Frédéric Mitterrand avait démarré peu après l'arrestation du cinéaste Roman Polanski, que le ministre de la Culture avait jugée «absolument épouvantable» et «pour une histoire ancienne qui n'a pas vraiment de sens». Le cinéaste franco-polonais a été interpellé le 26 septembre en Suisse dans le cadre d'une procédure américaine datant de 1977, la justice californienne lui reprochant d'avoir eu des «relations sexuelles illégales» avec une mineure âgée de 13 ans.

Après les explications du ministre, la vice-présidente du Front national, Marine Le Pen, a renouvelé son appel à la démission, accusant le ministre d'avoir «menti avec beaucoup d'impunité».