Le président français, Nicolas Sarkozy, qui a construit sa carrière politique en affichant sa fermeté sur les questions d'ordre et de sécurité publique, n'hésite pas à légiférer dans la foulée de faits divers spectaculaires. Même au risque de se voir accusé de démagogie.

Le chef d'État a donné une nouvelle illustration de cette tendance la semaine dernière en réaction à la mort de Marie-Christine Hondeau, 42 ans, étranglée alors qu'elle faisait son jogging dans une forêt au sud de Paris.

 

L'affaire a pris une portée politique importante après que les forces de l'ordre eurent révélé que le responsable du meurtre avait bénéficié d'une libération conditionnelle en mars 2007. L'homme avait été condamné cinq ans plus tôt à 11 ans de prison pour le viol et l'enlèvement d'une adolescente.

Comme il l'a souvent fait par le passé, le président a reçu la famille de la victime à l'Élysée jeudi dernier. Il a demandé à cette occasion au ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, de lui présenter en moins d'une semaine des suggestions pour minimiser les risques de récidive. Il a précisé qu'elles devraient être rapidement soumises pour adoption à l'Assemblée nationale.

Il a demandé notamment de «veiller... par une modification de notre législation, à une implication plus forte des services de police et de gendarmerie dans la surveillance» des condamnés ayant purgé leur peine.

Castration chimique

M. Hortefeux et son homologue à la Justice, Michèle Alliot-Marie, ont évoqué, en écho au président, la possibilité d'élargir l'usage de la «castration chimique», voire de la rendre obligatoire pour certains détenus jugés dangereux au moment de leur libération.

Le ministre de l'Intérieur a ajouté que le meurtrier présumé de la joggeuse n'aurait jamais dû être libéré, suscitant une levée de boucliers dans les milieux judiciaires. «Les déclarations de M. Hortefeux portent en germe la remise en cause du principe de l'aménagement des peines, avec son corollaire absurde et inhumain: l'enfermement perpétuel des personnes condamnées», a dénoncé le Syndicat de la magistrature.

L'organisation a demandé au chef d'État de rappeler à l'ordre le gouvernement pour faire cesser ces attaques «obscènes» contre les magistrats. Sans obtenir de réaction du chef d'État, qui a souvent lui-même lancé des salves similaires alors qu'il était ministre de l'Intérieur.

Violences physiques en hausse

Réagissant sur le meurtre de Marie-Christine Hondeau, le Parti socialiste a attaqué le chef d'État en l'accusant de «répondre à l'émotion d'un drame par l'annonce d'une énième réforme du droit pénal».

«En sept ans, il a fait voter 14 lois et 115 modifications du Code pénal... Dans le même temps, les violences physiques non crapuleuses ont crû de 48%. Cela démontre l'inefficacité d'une politique qui privilégie l'agitation sur l'action, l'affichage sur les résultats», dénonce la formation, qui propose une meilleure prise en charge psychologique des délinquants sexuels.

Le Monde, dans un éditorial paru hier, s'inquiète des «séances d'exorcisme à grand spectacle» orchestrées pas le président français après des meurtres ou des viols particulièrement sordides. «Jusqu'où... pousser la surenchère pénale et la relégation des 8000 délinquants sexuels emprisonnés sans verser dans une République qui ne serait plus seulement compassionnelle mais vengeresse, plus seulement protectrice mais démagogique?» demande le quotidien.