La Russie est en voie de dépeuplement. La population russe s'est réduite de 6,6 millions d'habitants depuis 1993, malgré un important flux d'immigrants, et cette tendance devrait s'aggraver encore, le pays risquant de perdre 11 millions d'âmes supplémentaires d'ici 2025, selon un rapport publié lundi par l'ONU.

Parmi les conséquences qu'énumère ce rapport du PNUD (Programme des Nations unies pour le développement), intitulé «la Russie confrontée au défi démographique»: un déficit de main d'oeuvre, le vieillissement de la population, une croissance économique ralentie et une perte de «force et de dynamisme». Les récents efforts du Kremlin en vue de relancer la natalité avec des mesures incitatives envers les femmes ont eu des résultats positifs, mais qui n'auront guère d'impact sur le long terme.

Selon l'ONU, la priorité pour la Russie est de réduire un taux de mortalité élevé, équivalent à celui qu'on rencontre dans certaines régions d'Afrique noire. Pour ce faire, il faudrait réformer un système de santé publique déficient et encourager de nouveaux modes de vie, principalement la réduction de la consommation d'alcool.

Selon une étude publiée en juin par le «Lancet», l'alcool, véritable fléau en Russie, serait en effet à l'origine de plus de la moitié des décès des hommes entre 15 et 54 ans depuis 1991 et l'implosion de l'URSS.

Si les niveaux de population dans nombre de pays industrialisés stagnent et devraient baisser d'ici 2025, ils ont baissé dès 1992 en Russie, où le taux de mortalité est l'un des plus élevés du monde développé. L'espérance de vie moyenne des hommes n'y est que d'à peine 60 ans.

Les Russes ont notamment un taux très élevé de maladies cardiovasculaires, dont les causes ne sont pas tout à fait comprises. Mais la plupart des experts mettent en cause un facteur principal pour expliquer le taux de mortalité: l'alcool. Lequel est accusé tous azimuts, des maladies du foie au nombre élevé de meurtres, suicides et accidents mortels.

En 1950, ce qui est aujourd'hui la Fédération de Russie avait la quatrième population de la planète. En 2007, elle était descendue au neuvième rang, derrière le Bangladesh et le Nigeria. En 2050, selon les projections de l'ONU, la Russie ne sera plus que 15e, derrière le Vietnam.

Et les effets de la dépopulation en Russie risquent d'être aggravés en raison de l'immensité de son territoire.

Ces 16 dernières années, un fort courant migratoire a permis d'adoucir l'impact de cette déperdition d'hommes. Mais il s'agissait principalement de Russes regagnant la mère-patrie depuis les anciennes républiques soviétiques, et ce flux est désormais tari.

En revanche, la balance migratoire pourrait s'inverser dans les décennies à venir, avec de plus en plus de Russes diplômés risquant de partir vers l'Europe occidentale, où une pénurie de main d'oeuvre qualifiée devrait faire grimper les salaires offerts aux plus diplômés.

Outre la lutte contre l'alcoolisme, la Russie peut également encourager l'immigration, estime le PNUD, qui évalue à 15 millions le nombre de migrants nécessaires d'ici 2025 pour occuper les emplois vacants. Mais dans ce cas, il faudrait l'assortir d'importants efforts en matière d'assimilation, ajoute l'ONU. Car à l'heure actuelle, les migrants en Russie sont en butte aux discriminations, au racisme, à l'exploitation, voire à la violence.