Il y a cinq ans, le chef des libéraux allemands Guido Westerwelle faisait son «coming-out» lors d'une banquet pour les 50 ans d'Angela Merkel. Il est aujourd'hui en passe de devenir le premier chef de la diplomatie européen ouvertement gay.

Le parti libéral FDP sera l'allié des conservateurs au sein du prochain gouvernement Merkel, aussi Guido Westerwelle devrait-il en devenir le numéro deux et récupérer, selon la tradition, les Affaires étrangères. Le fait que des politiciens soient homosexuels est courant en Europe. Mais selon des analystes, l'orientation sexuelle de M. Westerwelle pourrait constituer un handicap dans des régions comme le Moyen-Orient et l'Asie, où l'homosexualité est vue d'un très mauvais oeil.

«Si un ministre des Affaires étrangères d'un État important refuse de le rencontrer, ce sera évidemment un problème», dit Eberhard Sandschneider, directeur de la Société allemande de politique étrangère (DGAP). Toutefois «au bout du compte, il s'agit simplement de décider ce que sont les intérêts nationaux. Le reste n'est que distractions, dont on se dispensera».

La presse de certains pays comme l'Arabie saoudite, Singapour ou la Russie pourrait dans un contexte tendu exploiter l'homosexualité de M. Westerwelle comme un exemple de la «décadence occidentale», croit Volker Perthes, directeur de l'Institut allemand pour la politique internationale et la sécurité (SWP).

Mais «si un pays a intérêt à des relations diplomatiques avec l'Allemagne, il surmontera rapidement cela», dit-il.

Dans une interview à l'AFP il y a quelques mois, Guido Westerwelle, avocat de 47 ans, récusait les inquiétudes: «Je suis convaincu qu'aujourd'hui, la vie privée n'est plus un obstacle. Le fait qu'Angela Merkel soit devenue la première femme chancelière allemande a peut-être posé un problème à certains pays. Elle ne porte évidemment pas le voile quand elle foule le tapis rouge dans certains pays arabes».

«La secrétaire d'État américaine (Hillary Clinton) a aussi des entretiens dans des pays où les femmes sont systématiquement opprimées», ajoutait M. Westerwelle. «Ce sont nous, Allemands, qui décidons qui choisir pour représenter notre gouvernement, à l'aune de nos critères politiques et moraux».

Le quotidien de Cologne Stadt-Anzeiger s'inquiètait qu'en Afghanistan, Arabie saoudite, Mauritanie ou encore en Iran, la charia prévoit la peine de mort pour les homosexuels, et que d'autres pays au Moyen-Orient, en Asie ou en Afrique, envoient les homosexuels en prison.

«C'est comme ça, les révolutions», commentait le quotidien berlinois Tagesspiegel mercredi: «l'Allemagne va continuer à être gouvernée par une femme et, maintenant, aussi par un homosexuel déclaré».

Westerwelle avait fait son «coming-out» en 2004, en venant à la fête d'anniversaire de Mme Merkel avec son compagnon Michael Mronz, un homme d'affaires de 42 ans.

«Son homme le rend fort», titrait au lendemain des législatives de dimanche le quotidien populaire Bild avec une grande photo du «couple numéro un» de l'Allemagne politique enlacé à la Une.

Le Tageszeitung (gauche) a listé au rang des bons points du nouveau gouvernement l'homosexualité du futur numéro 2, mais en se demandant s'il sera «le bienvenu avec son conjoint à des réceptions d'État en Arabie saoudite ou en Syrie».

Les groupes de défense des gays et lesbiennes comptent sur Westerwelle pour faire jouer son influence dans les pays qui les persécutent. L'an dernier, M. Westerwelle avait évoqué de possibles coupes dans l'aide au développement à des pays homophobes.