Dispersés le long des quais, dormant sous des ponts ou cachés derrière des bosquets, de nombreux jeunes migrants afghans sont de retour à Calais, une semaine après le démantèlement hautement médiatisé de la «jungle», leur ancien campement du nord de la France.

Sur un quai, trois Afghans évacués mardi dernier de la «jungle» ont élu domicile derrière des arbustes, à deux pas de la mairie. «La police nous a laissés à Nîmes (sud), à plus de 1000 kilomètres de Calais et on a dû revenir en train. On ne comprend toujours pas pourquoi», expliquent Youssouf, Asseb et Muramad, qui se disent mineurs. De retour à Calais dès le lendemain de leur interpellation, ils disent tenter tous les soirs le passage vers l'Angleterre.

Depuis leur arrivée, il y a deux mois, ils n'ont d'ailleurs jamais abandonné le rêve de l'«eldorado» britannique, malgré la fatigue et la peur de la police qui les traque.

Ils se disent cependant plus stressés qu'avant le démantèlement de la «jungle», un campement de fortune abritant des centaines de migrants qui avait été installé sur une vaste lande d'une zone industrielle.

Un peu plus loin du quai, une centaine de migrants patientent avant l'heure du déjeuner. Ils se sont rassemblés par ethnies (Afghans, Irakiens, Erythréens...) pour attendre la camionnette d'une association, «Belle Étoile».

Un enfant irakien de trois ans attend lui aussi, assis dans un fossé avec ses parents. Ils sont arrivés il y a quelques jours.

«Ils reviennent progressivement. Ils ont peur. Ils dorment un peu partout maintenant», explique Françoise Peenaert, 61 ans, une bénévole de «Belle Étoile».

Consciente du «problème de logement», l'association a acheté des bâches qu'elle distribue aux migrants en même temps que leur panier repas. La bénévole leur conseille «de ne pas trop se regrouper, de rester disséminés».

Sur 138 étrangers majeurs en situation irrégulière placés en rétention après le démantèlement de la «jungle», 95 avaient déjà été libérés lundi après-midi, selon la Cimade, seule association présente dans les centres de rétention.

Concernant les 125 mineurs interpellés lors de la même opération, 28 ont d'ores et déjà quitté les centres d'accueil spécialisés du nord et de l'est de la France dans lesquels ils avaient été placés, selon la préfecture du département du Pas-de-Calais.

«Ce (lundi) matin, une quarantaine de migrants, dont une majorité d'Afghans, sont venus prendre leur douche. C'était à peu près le nombre qui passait avant l'évacuation du campement pachtoune», constate Maurice Collier, du Secours catholique.

Charles Framezelle dit «Moustache», de l'association C-Sur, note pour sa part que «depuis jeudi, il y a une agressivité incroyable» à Calais, et que «les migrants sont tous très tendus». Selon lui, «une bonne partie de ceux qui sont de retour sont des passeurs».

Une équipe de la chaîne de télévision France 2 a d'ailleurs été la cible de jets de pierres lundi matin.

«Toute personne de bon sens pouvait pressentir que cette action de démantèlement ne règlerait rien et qu'inévitablement ils reviendraient», a déclaré à l'AFP Jack Lang, député PS du Pas-de-Calais.

Face aux critiques, le ministre de l'Immigration Eric Besson a réaffirmé lundi soir que l'opération de démantèlement avait été «un succès».

«L'objectif, qui était de détruire un campement insalubre et une plaque tournante des filières clandestines à destination de l'Angleterre, est atteint», affirme-t-il, annonçant «deux nouvelles opérations» avant la fin de la semaine.