La France avait envisagé, quelques mois avant l'intervention américaine en Irak, d'accueillir des dignitaires du régime de Saddam Hussein, dont l'ex-vice premier ministre, Tarek Aziz, selon des notes d'un maître espion français révélées lundi par le quotidien Libération.

Dans un carnet daté du 3 décembre 2002, le général Philippe Rondot, évoque un «accord de principe (de Paris) pour +récupérer+ si nécessaire Tarek Aziz et Al Raffei (ancien député du parti Baas, ndlr)».«Point de situation en Irak: exfiltration personnalités. ex: Tarek Aziz, sources, ingénieurs. Mon déplacement sur zone mi-janvier», écrit-il après avoir rencontré le chef d'état-major du président Jacques Chirac.

Le général Rondot était conseiller pour le renseignement et les opérations spéciales du ministre de la Défense entre 1997 et 2005, date de son départ à la retraite.

Il note avoir informé de ses projets le ministre des Affaires étrangères Dominique de Villepin le 2 janvier 2003. «Informé de mes projets sur S. Hussein. S'attendre à ce que nous devions récupérer des Irakiens cherchant à "s'abriter" à l'ambassade, des chercheurs sensibles, le cas de Tarek Aziz».

«Les contacts directs que j'entretiens avec le ministre de la Défense et les divers services syriens me laissent penser que la Syrie pourra nous servir de base de départ pour d'éventuelles opérations clandestines sur le théâtre irakien, note-t-il encore.

En novembre 2002, il écrivait de l'Irak qu'«il y aura sans doute une action militaire d'ampleur inconnue».

Tarek Aziz s'était finalement rendu aux troupes américaines fin avril 2003 après la chute du régime de Saddam Hussein. Condamné dans deux procès à 15 ans et à 7 ans de prison, il est incarcéré dans une prison proche de Bagdad.

Par ailleurs, le général Rondot a évoqué des «assassinats ciblés» de membres d'Al-Qaïda, auxquels se serait opposé Jacques Chirac.

En revanche, indique-t-il, l'ex-premier ministre socialiste Lionel Jospin et son ministre de la Défense, Alain Richard étaient pour leur part «assez favorables» à ces opérations.

Interrogés dans Libération, les deux hommes démentent. «C'est de la fantasmagorie. Jamais cette problématique d'élimination ou ce type d'opération n'a été évoquée à mon niveau», a assuré M. Jospin.

Les notes du général Rondot ont fait l'objet de fuites dans la presse. Elles ont été saisies par les juges enquêtant sur l'affaire Clearstream et dont l'ex-agent du renseignement est un des protagonistes avec le président Nicolas Sarkozy, partie civile dans le dossier.