Les autorités roumaines ont ouvert une enquête sur un trafic d'ovules qui se poursuivait dans une clinique de Bucarest pourtant rayée depuis 2006 des établissements autorisés à pratiquer des fécondations in vitro.

Une trentaine de personnes sont poursuivies dans cette affaire, dont les deux responsables israéliens de la clinique Sabyc -un père et son fils arrêtés lundi- ainsi que deux de leurs compatriotes spécialisés dans les techniques de procréation assistée, selon le Parquet.

Ces personnes sont accusées d'avoir «organisé un trafic de cellules humaines avec pour but d'obtenir des bénéfices matériels».

Selon les médias, les bénéficiaires, des Israéliennes pour la plupart, payaient entre 15 000 et 18 000 dollars pour une fécondation in vitro (FIV) réalisée avec des ovules provenant de jeunes Roumaines en difficulté.

Ces dernières, qui n'étaient pas informées des risques auxquels elles s'exposaient, étaient récompensées de sommes allant de 800 à 1000 lei (240 à 300 dollars), en violation de la loi sur le don d'organes ou de cellules.

«Profiter de la situation financière précaire des donatrices pour gagner de l'argent n'est pas seulement immoral mais criminel», s'est insurgé le président de l'Ordre des médecins, Vasile Astarastoaie.

«Le plus grave, c'est que des médecins ont foulé aux pieds la dignité humaine et se sont livrés à un trafic de cellules en ignorant volontairement les risques pour la santé», a-t-il déclaré à l'AFP.

Selon lui, l'Ordre des médecins avait rayé dès 2006 Sabyc du registre des cliniques pouvant procéder à des FIV, car elle n'était autorisée qu'à mener un programme de recherches. «Les FIV se sont poursuivies» en dépit de cette interdiction, a ajouté le docteur.

Selon le directeur de l'Agence pour les transplantations, Victor Zota, cette clinique, créée en 1999, n'a été autorisée officiellement à réaliser des FIV qu'il y a une semaine, alors que sur son site internet elle assure en avoir pratiqué pas moins de 1200. Lors d'une perquisition dans ses locaux dimanche, «les enquêteurs ont dénombré 30 personnes prêtes à subir une FIV», a précisé le Parquet. Ils ont également découvert que les employés falsifiaient les dossiers des donatrices, modifiant leurs caractéristiques physiques telles que la couleur des yeux ou des cheveux, ou encore leur QI, afin qu'elles correspondent aux exigences des bénéficiaires.

Selon les médias, qui ont interrogé plusieurs donatrices, la plupart d'entre elles étaient des Roms. Le sénateur Iiulian Urban parle lui de «complicités au sein du ministère de la Santé et de la police» et évoque une possible évasion fiscale de la clinique sur des «bénéfices de 20 millions d'euros».

La Roumanie avait déjà été le théâtre d'un scandale similaire en 2005, lorsque les autorités avaient découvert à Bucarest une autre clinique, Global Art, se livrant à un trafic d'ovules. L'enquête avait été close sans aboutir à des condamnations.

Selon l'hebdomadaire Academia Catavencu, les médecins de Global Art sont partis depuis s'installer à Chypre, tout en continuant de recruter des donatrices roumaines. M. Astarastoaie se garde toutefois de qualifier la Roumanie de «destination du tourisme procréatif», même si pour les ressortissants de l'Union européenne, une FIV pratiquée dans ce pays «revient sept ou huit fois moins cher» qu'ailleurs.