Véronique Courjault, une mère jugée pour trois infanticides de nouveaux-nés mis au monde clandestinement, a été condamnée jeudi à huit ans de prison, au terme d'un procès complexe et très suivi en France.

Après un dernier regard à son mari et avoir touché la main d'une de ses soeurs, l'accusée, une petite brune de 41 ans à la mise ordinaire, a quitté son box, en larmes. Elle était pourtant restée impassible à l'annonce du verdict, rendu après presque huit heures de délibéré.

Jugée pour «assassinats», Mme Courjault encourait la réclusion criminelle à perpétuité.

L'avocat général avait requis la veille 10 ans de prison.

«Ne diabolisez pas Véronique Courjault, mais n'en faites pas une icône non plus», avait-il demandé.

«Cette femme a commis une faute, un crime, mais ce n'est pas un monstre», avait lancé pour sa part, la voix brisée par l'émotion, Henri Leclerc, l'un des conseils de Véronique Courjault.

Une grande partie du procès, commencé le 9 juin, avait tourné autour du degré de conscience qu'avait Mme Courjault des actes qu'elle avait commis.

L'avocat général a exprimé sa certitude qu'il ne s'agissait «en aucun cas d'un déni de grossesse», ce phénomène qui fait qu'une femme ne se sait pas ou refuse d'admettre qu'elle est enceinte, son entourage n'y voyant que du feu.

Dans son ultime déclaration à la cour, le visage rouge envahi par les larmes, Véronique Courjault a murmuré: «J'ai essayé de m'expliquer comme j'ai pu, je sais que mes mots ne sont pas souvent à la hauteur...».

«Je voudrais dire que j'ai conscience d'avoir tué nos enfants et que c'est quelque chose qui me restera longtemps», a-t-elle poursuivi en jetant un coup d'oeil vers son mari, qui n'a cessé de lui marquer son soutien.

Mme Courjault avait déjà reconnu que ce procès lui avait «permis de prendre conscience de plein de choses». «Mais je n'ai toujours pas de réponse», avait-elle précisé.

Pourquoi cette mère de deux enfants - âgés de 12 et 14 ans -, présentée par ses proches comme «une bonne maman, discrète, gentille», a-t-elle tué ses trois bébés? Des actes qu'elle a elle-même qualifiés de «monstrueux et inexplicables».

«J'ai eu conscience d'être enceinte, cette conscience je l'ai perdue à un moment. Pour moi, je n'attendais pas de bébés», a expliqué l'accusée.

Faux, ont rétorqué les experts-psychiatres qui l'ont examinée.

«Elle savait qu'elle était enceinte et que la mort était la conséquence inévitable de sa dissimulation», a affirmé le docteur Paul Bensussan.

Pour le docteur Fanny Puel-Metivier, elle a «rangé cette réalité dans un tiroir de sa tête et parfois l'ouvrait avant de vite le refermer».

C'est la découverte par le mari, à l'été 2006, de deux petits cadavres dans le congélateur familial à Séoul, qui avait lancé l'affaire.

Après avoir nié, Véronique Courjault a finalement reconnu être la mère. Et a avoué trois infanticides de nouveaux-nés: le premier, dont elle a brûlé le corps, est né en France à l'été 1999; les deux autres, en septembre 2002 et décembre 2003, à Séoul où son mari, ingénieur, travaillait pour une société américaine.

Jean-Louis, 42 ans, a été mis hors de cause après avoir été dans un premier temps inculpé pour «complicité d'assassinats». Il s'est montré très soulagé jeudi soir.

«C'est une peine qui va nous permettre de reconstruire, d'entrevoir le bout du tunnel. Je viens de l'annoncer à mes enfants et je peux vous assurer qu'il y a de la joie à la maison. Dans quelques temps (....), quelques mois (...), Véronique pourra retrouver ses enfants et ce sera le début du renouveau», a-t-il dit à la presse.