S'il n'en tient qu'au gouvernement, les Français devront travailler plus longtemps avant de pouvoir se retirer du marché du travail avec une pension conséquente.

Le premier ministre, François Fillon, a déclaré lundi, lors de son passage au Salon aéronautique du Bourget, qu'un rehaussement de l'âge légal de la retraite, actuellement fixé à 60 ans, n'était pas «tabou».«C'est une question qui mérite un grand débat national», a déclaré le politicien, en précisant qu'elle devrait idéalement être traitée dans le cadre d'une campagne électorale présidentielle ou lors des législatives.

Le sujet sera remis sur le tapis en février 2010, lorsque le Conseil d'orientation des retraites déposera un rapport sur les voies à suivre pour remettre à flot le régime public, confronté cette année à un manque à gagner de plus de 10 milliards de dollars.

Dimanche, le ministre du Travail, Brice Hortefeux, avait évoqué une telle réforme en entrevue à France Inter.

«Comme on sait que si on ne fait rien, on va dans le mur, il n'y a pas aujourd'hui à ma connaissance 36 solutions; il y en a trois: diminuer les pensions, augmenter la durée de cotisation ou reporter l'âge de départ à la retraite comme l'ont fait les Allemands, sur une trentaine d'années, à 67 ans», a-t-il déclaré.

Une diminution des pensions serait particulièrement embarrassante pour le président Nicolas Sarkozy, qui avait fait de l'augmentation du pouvoir d'achat un des thèmes centraux de sa campagne en 2007.

Sévère tour de vis?

Le gouvernement a par ailleurs déjà décidé d'augmenter la durée de cotisation requise pour bénéficier d'une pleine pension. De 37,5 ans en 1994, elle doit progressivement croître jusqu'à 41 ans en 2012.

L'âge légal de la retraite varie entre 57 et 67 ans à l'échelle européenne, comparativement à 60 ans en France. Les aînés de l'Hexagone ont l'un des taux d'activité les plus faibles du continent, soit 37,6% alors que la moyenne est de 42,5%.

L'ouverture du gouvernement sur l'âge de la retraite a été saluée hier par Laurence Parisot, présidente du MEDEF.

La principale organisation patronale du pays estime, en écho à M. Hortefeux, qu'il est urgent de changer les paramètres du régime de retraite public pour éviter d'aller «dans le mur».

Le Parti socialiste a pour sa part fustigé les déclarations du gouvernement en l'accusant de vouloir faire porter uniquement aux travailleurs le poids du manque à gagner du régime.

«Les projets de la droite de démantèlement des droits sociaux des salariés sont toujours à l'ordre du jour», souligne le porte-parole de la formation, Benoît Hamon, qui soupçonne le parti au pouvoir de vouloir tirer profit de sa victoire aux élections européennes pour imposer «un sévère tour de vis» à la population.

Place aux jeunes

Les principaux syndicats sont rapidement montés au front, arguant qu'il était «particulièrement déplacé» d'envisager de rehausser l'âge légal de la retraite alors que se multiplient les mises à pied dans les entreprises.

«Il va être très difficile de dire aux jeunes: désolé, il n'y a pas de place pour vous, ceux qui ont déjà du travail vont devoir rester», a ironisé Bernard Thibault, secrétaire général de la Confédération générale du travail (CGT).

L'intervention du gouvernement sur la question des retraites survient alors que les syndicats peinent à mobiliser leur base pour obtenir de l'État des concessions susceptibles d'amortir les effets de la crise.