Deux mois après le séisme qui a frappé la région de L'Aquila dans les Abruzzes (centre de l'Italie), la colère et la frustration sont perceptibles chez les quelque 58 000 réfugiés obligés de vivre sous la tente dans des conditions difficiles depuis le 6 avril.

Presque toute la ville reste classée «zone rouge dangereuse» et les pompiers s'affairent toujours à consolider les principaux édifices. Les premiers travaux de déblaiement n'ont pas commencé, et encore moins ceux de reconstruction.

Samedi dernier, 600 personnes déplacées ont pour la première fois manifesté contre la lenteur de la reconstruction aux cris de «Reprenons le contrôle de notre ville».

Le gouvernement de Silvio Berlusconi a promis de reloger toute la population des camps de toile avant l'hiver 2009 en réparant les logements qui peuvent l'être ou en en construisant de nouveaux.

«Il y a beaucoup d'amertume dans la population» a déclaré à l'AFP sous couvert de l'anonymat un responsable de la logistique des pompiers pour le centre ville de L'Aquila.

Celui-ci a jugé peu probable qu'une majorité des habitants puissent regagner leurs appartements avant le printemps 2010 soit un an après le séisme qui a coûté la vie à près de 300 personnes.

«Presque toute la ville est inaccessible car dangereuse. Beaucoup de maisons sont restées debout mais les rues qui y conduisent sont périlleuses», a-t-il expliqué.

«Beaucoup d'immeubles paraissent intacts de l'extérieur mais à l'intérieur tout est dévasté», a-t-il ajouté.

«Jusqu'à présent nous avons entendu surtout de belles paroles», commente Giusti Contino, un cuisinier retraité dans la grande tente bruyante qui sert tout à la fois de réfectoire, de salle télé et de jeux avec un baby-foot pour l'un des 180 villages de toile répartis autour de la ville.

«Le mécontentement s'étend dans les camps de toile invivables comme dans les hôtels réquisitionnés mais surpeuplés de la côte Adriatique» écrivait récemment dans son éditorial «Le Centre», le journal local des Abruzzes. «Tôt ou tard il y a un risque que cette colère n'explose.»

Les autorités ont décidé la semaine dernière que les manifestations seraient interdites et ont recommandé discrètement qu'on veille à ne plus trop servir aux réfugiés de café, d'alcool, ou même de coca-cola car il s'agit de «produits potentiellement stimulants», écrit «Le Centre».

L'Aquila reste une ville fantôme avec ses rues bloquées par des murs écroulés, ses immeubles affaissés et ses églises aux clochers chancelants et aux trous béants au chevet duquel s'affairent les pompiers.

Seuls des pompiers et des ouvriers de quelques entreprises publiques ou privées spécialisées dans la consolidation des bâtiments sont autorisés à pénétrer dans la ville où de temps à autre des secousses sont perceptibles.

Trois semaines après le désastre, Silvio Berlusconi a créé la surprise en annonçant que le sommet des chefs d'État du G8 des huit pays les plus développés se tiendraient du 8 au 10 juillet dans une école militaire des faubourgs de L'Aquila et non dans l'île paradisiaque de La Maddalena en Sardaigne.

«Ce sera un signe de solidarité» avec les victimes du tremblement de terre et permettra d'épargner 220 millions d'euros qui pourront être mieux employés à L'Aquila que dans l'hébergement des milliers de participants du G8 dans des navires de croisière de luxe, avait-il indiqué.

Pour le responsable de la logistique des pompiers cependant, cette décision «représente incontestablement une charge supplémentaire» pour les milliers de pompiers et de volontaires de la Croix-Rouge qui avaient fait de l'école le principal centre de secours de la région.