La majorité communiste au Parlement de Moldavie a décidé de reporter au 3 juin l'élection prévue jeudi du nouveau président du pays, faute de pouvoir imposer son candidat, le Premier ministre Zinaïda Greceanii, et alors qu'un échec du vote provoquerait une dissolution.

Déjà le 20 mai, il avait manqué une voix au PC pour élire le successeur du président communiste Vladimir Voronine, au pouvoir depuis 2001 mais qui ne peut briguer un troisième mandat. Selon la Constitution, si un deuxième vote échoue, de nouvelles législatives doivent avoir lieu.Les communistes ont expliqué reporter le vote au 3 juin en raison de la fête de l'Ascension, célébrée jeudi en Moldavie, un pays où la majorité de la population est de confession orthodoxe.

«Aujourd'hui est une grande fête religieuse et il ne serait pas acceptable que les députés se disputent ce jour là», a lancé la chef du groupe parlementaire communiste, Maria Postoico.

Cette justification a été dénoncée comme un prétexte par l'opposition, qui a juré de bloquer l'élection du président afin d'obtenir la dissolution du Parlement élu le 5 avril, à l'issue de législatives ponctuées d'émeutes.

«L'ordre du jour avait été validé, il ne doit pas être question de fête religieuse. La société attend une solution!», a lancé le président du parti libéral démocrate, Vlad Filat, devant les députés.

Pour être élu à la tête de l'Etat moldave, un candidat doit rassembler les voix de 61 des 101 députés, or le PC ne dispose que de 60 parlementaires.

Selon des experts interrogés par l'AFP, il y a peu de chances qu'un compromis entre opposants et communistes intervienne avant la date limite légale du 7 juin, et le pays s'oriente dès lors vers des législatives anticipées.

«On dit qu'il y a toujours quelqu'un à corrompre dans l'opposition, mais cela est peu probable au regard du degré de confrontation entre le parti au pouvoir et les autres partis», estime Igor Munteanu, directeur de l'Institut moldave pour le développement et les initiatives sociales.

Les trois mouvements de l'opposition parlementaire ont d'ores et déjà promis de ne rien changer à leur stratégie: «Je suis sûr que les 41 députés de l'opposition ne voteront pas», a ainsi déclaré Serafim Urechean, le leader de l'Alliance Notre Moldavie.

Les communistes jugent, eux, que la candidature du Premier ministre Zinaïda Greceanii, une spécialiste des finances publiques de 53 ans, est déjà un compromis, cette dernière n'étant pas membre du PC.

Si elle était élue, cette ancienne ministre des Finances serait la première femme à diriger un pays de la Communauté des Etats indépendants (l'ex-URSS moins les pays baltes et la Géorgie).

Le chef de l'Etat sortant, Vladimir Voronine, reste quant à lui une figure centrale de la vie politique en Moldavie, puisqu'il a été élu à la présidence du Parlement le 12 mai.

Pour parachever ce jeu de chaises musicales, le président sortant du Parlement, Marian Lupu, doit devenir Premier ministre si Mme Greceanii est élue chef de l'Etat.

Les législatives du 5 avril ont été suivies de manifestations anti-communistes qui ont dégénéré en émeutes, culminant avec le saccage du Parlement et de la présidence.

La Moldavie, Etat roumanophone coincé entre la Roumanie et l'Ukraine, est considérée comme le pays le plus pauvre d'Europe. Depuis leur arrivée au pouvoir en 2001, les communistes ont alterné entre une politique pro-occidentale et un rapprochement avec Moscou.