Après bien des atermoiements, le gouvernement allemand a renoncé à l'interdiction du paintball pour renforcer le contrôle des armes après un massacre mi-mars dans un lycée, mais cette activité demeure dans sa ligne de mire, au grand dam des pratiquants.

Pour certains hommes politiques, ce jeu «simule le massacre» puisque les participants, équipés de masques de protection, se tirent dessus à coup de billes de peinture propulsées par des lanceurs à air comprimé ou de CO2. Ils veulent donc en limiter l'essort, bien que ses 50 000 adeptes en Allemagne doivent déjà être âgés de 18 ans au moins et n'aient pas droit de porter de tenues para-militaires.

«On peut moralement condamner de tels jeux. Mais on ne peut pas interdire tout ce qu'on considère comme moralement répréhensible», a tranché la ministre de la Justice Brigitte Zypries après une semaine de déclarations ministérielles contradictoires.

Le débat sur le contrôle des armes a été relancé en Allemagne après une tuerie à Winnenden (sud-ouest) il y a deux mois. Un adolescent de 17 ans, avec le pistolet de son père, a abattu 15 personnes, la plupart dans son ancien lycée, avant de se suicider.

Pour Dieter Wiefelsp-tz, un responsable des Affaires intérieures au parti social-démocrate (SPD, membre de la coalition gouvernementale), toutes les modifications possibles de la législation sur les armes doivent être examinées, y compris les règles touchant au paintball.

«Partout ailleurs, en Suède, en France, aux Pays-Bas, les gens peuvent faire ce qu'ils veulent. Nous sommes les seuls à être bridés», s'insurge Franziska L-ddemann, propriétaire de Paintgalaxy, le seul club de paintball de Berlin.

«On montre même ça sur Eurosport 2», une chaîne de télévision sportive, souligne-t-elle.

Pour Stefan Wurbach, un étudiant ingénieur de 29 ans, qui participe à une séance de paintball aux côtés d'une douzaine d'autres jeunes hommes et d'une femme, «il s'agit d'un sport d'équipe».

«Les arguments selon lesquels  le jeu encourage les massacres ne tiennent pas», ajoute-t-il.

«Nous nous entraînons en équipe. Nous faisons tout en équipe. Les gens ne font pas ça pour jouer aux militaires. Ils font ça en tant que sport, comme jouer au volley ball», affirme-t-il.

Le fait que le jeu soit critiqué dans le  pays tient selon lui «à l'histoire de l'Allemagne».

L'annonce par le gouvernement qu'il songeait interdire le paintball a déclenché une rafale de protestations, dont de nombreuses lettres aux députés, et des menaces de porter l'affaire devant la Cour européenne des droits de l'Homme.

Une étude réalisée par des sociologues de l'Université de Trèves et publiée en 2000 estimait que les joueurs de paintball recherchaient «la simulation de la violence», mais n'en constituaient pas pour autant une menace pour la société.

«La théorie selon laquelle un comportement imitant la mise à mort (...) serait ensuite répliqué dans la vie quotidienne ne peut pas être vérifier à l'heure actuelle», soulignait notamment l'étude.

Les joueurs sont des gens «normaux» qui «après le jeu s'en retournent tranquillement à leur vie quotidienne», ajoutait cette étude.

La plupart des équipes de paintball portent d'ailleurs des noms farfelus plutôt que «guerriers» -- tels «les nains de Stuttgart» ou les «abeilles», notaient les sociologues, même si un groupe a pris le nom de W.A.R. (guerre en anglais).