La police russe a dispersé samedi une manifestation interdite qui tentait de tirer parti de la tenue à Moscou dans la soirée de la 54e finale de l'Eurovision pour promouvoir la cause homosexuelle, interpellant plus d'une trentaine de militants gays.

Cette démarche n'est pas une surprise, l'un des responsables du ministère russe de l'Intérieur ayant répété vendredi que le rassemblement, baptisé «Gay pride slave» par ses organisateurs, était interdit et que la police entendait agir à son encontre «en application stricte de la loi». De quoi signifier clairement que les autorités moscovites n'entendaient pas faire d'exception pour cause d'Eurovision, bien que cet événement compte beaucoup de fans dans les milieux homosexuels.

La mairie de Moscou est farouchement opposée au mouvement gay et interdit régulièrement tout défilé dédié à sa cause.

Quelques dizaines de manifestants s'étaient rassemblés en début d'après-midi près de l'Université de Moscou, clamant des slogans comme «L'homophobie est une honte pour la Russie!» et «Droits égaux pour tous», avant d'être interpellés en plusieurs vagues, a constaté une journaliste de l'AFP.

Le militant britannique Peter Tatchell, a indiqué par la suite à l'AFP par téléphone qu'une trentaine de personnes, dont lui-même, avaient été arrêtées lors de ce rassemblement, qui intervenait en outre à la veille de la journée mondiale de lutte contre l'homophobie dimanche.

«Les méthodes de la police étaient plutôt violentes. On a tordu les bras des gens derrière leur dos (...) C'était assez douloureux», a-t-il témoigné.

Nikolaï Alexeïev, fondateur du site Internet GayRussia.ru et principal organisateur de la manifestation, a été interpellé.

La police s'est saisie également d'un homme habillé en robe de mariée et d'un militant gay américain.

Dans un communiqué publié peu après, M. Alexeïev a appelé les artistes devant participer dans la soirée à la finale de l'Eurovision à «boycotter l'événement de ce soir et envoyer un message disant que l'oppression des droits de l'Homme par la Russie n'est pas acceptable».

«Le gouvernement russe utilise l'Eurovision cette année comme un gala pour montrer au monde les progrès qu'a fait le pays depuis le début des années 90. Mais ce qui a été observé cet après-midi dans les rues de Moscou montre au monde à quel point la Russie a peu avancé en matière de droits de l'Homme fondamentaux», ajoute-t-il.

Quelques militants orthodoxes, opposés au mouvement homosexuel, ont également été interpellés place Pouchkine, au centre de Moscou, où le rassemblement gay avait été initialement annoncé, a rapporté l'agence Interfax.

À Moscou, lors de précédentes gay pride interdites en 2006 et 2007, de jeunes ultra-nationalistes avaient violemment agressé des militants gay.

La Russie, vainqueur de l'Eurovision l'an dernier avec son chanteur Dima Bilan, accueille pour la première fois sur son sol cette extravagante célébration de la pop musique, regardée chaque année par des dizaines de millions de téléspectateurs européens, et qui suscite de l'intérêt jusqu'au Canada ou en Australie.

Les autorités russes, bien décidées à le mettre à profit pour flatter l'ego des Russes et démontrer leur capacité d'organiser un événement de grande ampleur, ont mis les petits plats dans les grands, et n'ont pas lésiné sur les moyens, en consacrant quelque 32 millions d'euros à cet événement, ce qui en fait l'un des concours les plus chers de l'histoire de l'Eurovision.

La finale, qui rassemble 25 pays, doit commencer à 23H00 locales dans un stade olympique du centre-ville. Les favoris de l'édition 2009 sont la Norvège et la Turquie.