Huit personnes ont été inculpées après le massacre qui a fait 44 morts, dont des enfants et des femmes enceintes, pendant un mariage dans un village kurde du sud-est de la Turquie.

Les suspects ont été arrêtées peu après l'attaque du village de Bilge, lundi soir dans la province de Mardin, a précisé le gouverneur de la province, Hasan Duruer, cité par l'agence Anatolie.

Parmi les inculpés figure un adolescent de 14 ans, a ajouté M. Duruer qui n'a pas donné de précisions sur les charges retenues contre les prévenus mais a signalé que ceux-ci avaient choisi de garder le silence pendant les interrogatoires.

Deux autres personnes étaient toujours interrogées par les forces de sécurité, selon Anatolie.

Le massacre, selon des témoins, a eu lieu au cours d'une cérémonie de mariage dans le village. Les assaillants ont mitraillé à l'arme automatique les habitants de plusieurs maisons avant de prendre la fuite à la faveur de la nuit et d'une tempête de sable.

Parmi les victimes figurent la jeune mariée, son époux, les parents ainsi que la petite soeur de ce dernier, âgée de quatre ans, et l'imam du village.

Le ministre turc de l'Intérieur, Besir Atalay, a déclaré mercredi à la presse que plusieurs «gardiens de village», une milice kurde payée par le gouvernement pour lutter avec l'armée contre les rebelles kurdes du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), figuraient parmi les prévenus.

«Il y a des gardiens de village aussi bien parmi les victimes que parmi les assaillants. Les armes utilisées sont celles qui ont été remises aux gardiens de village. C'est important. Nous sommes en train d'évaluer la question», a déclaré le ministre à Ankara.

Plus de 60.000 civils kurdes sont armés et payés par l'Etat depuis 1985 pour aider les forces de sécurité à combattre le PKK, en lutte contre le régime turc depuis 1984.

La dissolution de cette milice a été réclamée à plusieurs reprises d'autant que, de l'aveu même des autorités, les miliciens sont régulièrement impliqués dans des affaires de drogue ou de viols.

Selon Anatolie, citant un travailleur social, environ 70 enfants ont perdu au moins un de leurs parents dans le massacre.

Le Croissant-Rouge turc a annoncé dans un communiqué l'envoi de huit psychologues à Bilge pour soutenir les survivants.

Les forces de sécurité ont établi un cordon de sécurité autour des maisons des proches des prévenus pour empêcher d'éventuelles représailles, ce qui n'a pas empêché le départ de plusieurs familles, craignant pour leurs vies, a rapporté Anatolie.

«Bien que nous soyons innocents, ils (les villageois) nous accusent. Si les gendarmes ne sont pas là, ils vont nous tuer. Nous ne sommes plus en sécurité, nous devons émigrer», a déclaré un des fuyards, Ahmet Celebi, cité par l'agence.

M. Atalay a affirmé que les forces de sécurité avaient fait la lumière sur l'affaire, mais a refusé de donner des détails. «Il y a eu une succession d'événements au fil des ans, qui ont conduit à l'attaque. Il y a eu une raison importante qui a accéléré le processus», a-t-il déclaré.

Plus tôt dans la journée, relatant un entretien avec un des rescapés de la tuerie, M. Atalay avait signalé que l'homme avait fait état, comme mobile possible du massacre, de «jalousies qui s'accumulaient depuis longtemps» entre familles.

Le gouverneur de Mardin a pour sa part estimé que l'attaque n'était pas la conséquence d'une vendetta mais «d'inimitiés, de jalousies et de conflits d'intérêts».

Selon des témoignages recueillis par l'AFP, une dette entre familles serait à l'origine du drame.