Le juge d'instruction espagnol Baltasar Garzon a ouvert mercredi une enquête préliminaire visant les «auteurs matériels» et «concepteurs» du camp de prisonniers américain de Guantanamo, selon un procès verbal reçu par l'AFP.

Cette enquête, qui fait suite à une plainte déposée par quatre anciens détenus de Guantanamo, dont un de nationalité espagnole, vise «les possibles auteurs matériels, concepteurs ou complices» du système carcéral de ce camp situé à Cuba et des tortures qui y ont été commises.

Elle est sans rapport avec une autre procédure bloquée par le parquet espagnol qui visait d'anciens responsables de l'administration Bush.

«Il semble que les documents déclassifiés par l'administration américaine et mentionnés par les médias ont révélé ce qui n'était auparavant qu'un soupçon: l'existence d'un plan autorisé et systématique de tortures» à Guantanamo, relève le juge Garzon.

«Ce plan systématique configure la possible existence d'un action concertée pour l'exécution d'une multitudes de délits de tortures contre les personnes privées de liberté à Guantanamo et d'autres prisons dont celles de Bagram (Afghanistan), qui acquiert quasiment un niveau officiel» relève le magistrat.

La justice espagnole se reconnaît, depuis 2005, une compétence universelle pour enquêter sur les crimes contre l'humanité, génocides et tortures commis dans le monde entier, même si les victimes ou bourreaux ne sont pas espagnols. Sauf si ces faits ne font ou n'ont pas fait l'objet d'une enquête dans le pays où ils ont été commis.

Le parquet espagnol s'était officiellement opposé le 17 avril à l'ouverture d'une enquête par le juge Garzon sur la création de la prison de Guantanamo, visant des anciens responsables juridiques de l'administration Bush.

Le magistrat avait sollicité l'avis du parquet sur les suites à donner à une plainte pour tortures déposées par une association espagnole contre six responsables juridiques de l'administration Bush.

Etaient notamment visés des membres du sous-secrétariat à la Défense, du parquet fédéral et des conseillers de M. Bush-, dont l'ex-procureur général des Etats-Unis Alberto Gonzales, selon certains médias.

Le parquet avait estimé que cette plainte n'était pas recevable car elle visait des personnes sans pouvoir de décision qui avaient simplement élaboré «des rapports judiciaires non contraignants» sur Guantanamo.