Une série de révélations sur les généreux défraiements des ministres et députés britanniques a obligé le gouvernement de Gordon Brown à promettre une réforme du système, au moment où le pays, en pleine récession, est appelé à se serrer la ceinture.

Après les ministres des Finances Alistair Darling et des Transports Geoff Hoon, c'est la ministre du Logement Margaret Beckett qui s'est retrouvée sur la sellette cette semaine pour avoir entretenu trois domiciles aux frais du contribuable, selon le quotidien Evening Standard.

Sans être illégale, l'attitude de ces ministres qui résident dans un logement de fonction, tout en demandant un remboursement des frais de leur résidence en province et en mettant en location le domicile londonien qu'ils occupaient avant d'entrer au gouvernement, n'en finit pas de scandaliser l'opinion.

Au-delà du gouvernement, c'est toute la classe politique britannique qui est éclaboussée: selon un sondage Populus publié mardi, 27% des Britanniques estiment que presque tous les députés abusent des règles en vigueur, et 42% qu'une majorité le font.

C'est la ministre de l'Intérieur Jacqui Smith qui est dans la position la plus inconfortable alors qu'elle fait l'objet d'une enquête parlementaire. La ministre a déclaré comme résidence principale une chambre dans l'appartement de sa soeur à Londres et réclamé plus de 116.000 livres (127.992 euros) pour une «résidence secondaire», qui est en fait son domicile familial à Redditch (centre de l'Angleterre).

Soupçonnée d'avoir voulu profiter au maximum du système de défraiement, elle a nié toute manipulation, soulignant qu'elle passait la majorité de son temps à Londres.

Mais la presse déterre chaque jour plus de détails sur ses notes de frais, comme un barbecue à 39,99 livres ou un chauffage de terrasse à 160 livres.

Plus gênant, Jacqui Smith a dû présenter d'humiliantes excuses publiques après la publication d'une note de frais incluant la location de deux films pornos, apparemment effectuée à son insu par son mari.

«C'est une erreur embarrassante (...) mais j'ai fait des excuses et je l'ai rectifiée», a souligné la ministre mardi sur la radio BBC Four, excluant une démission.

«Nous reconnaissons qu'il y a un manque de confiance du public, les gens s'inquiètent de la situation, et c'est compréhensible, donc nous allons changer les règles» a annoncé lundi la ministre en charge des relations avec le Parlement, Harriet Harman, promettant une réforme du système.

Paradoxalement, ces révélations ont été rendues possible par un effort de transparence auquel les députés ont été contraints par la justice.

Une société privée a été chargée de scanner les notes de frais des députés depuis plusieurs années et de les compiler en vue d'une publication à la fin de la session parlementaire, après avoir ôté des détails trop personnels.

Mais le CD-rom contenant ces précieuses données a apparemment fait l'objet de fuites. Le Times a rapporté qu'un homme d'affaires lui avait proposé de lui fournir ces données en échange de 300.000 livres (331.000 euros).

D'autres journaux n'ont apparemment pas tant fait la fine bouche et distillent des révélations embarrassantes -- qui ne touchent pour l'instant que des travaillistes -- quasi quotidiennement.

«L'humeur a dangereusement viré à l'aigre alors que les fantômes des dépenses des chers députés et le mépris du public augmente avec chaque nouvelle révélation», prévient un éditorialiste du tabloïde de gauche Daily Mirror.

Les députés britanniques perçoivent un salaire de 63.291 livres (69.830 euros) par an, et peuvent obtenir le remboursement des frais de fonctionnement de leur secrétariat, de voyage et d'un deuxième domicile.