Le Tribunal pénal international (TPI) pour l'ex-Yougoslavie a acquitté jeudi l'ancien président serbe Milan Milutinovic et condamné à des peines allant de 15 à 22 ans de prison ses cinq co-accusés pour leur rôle dans la guerre du Kosovo (1998-1999).

«La chambre vous estime, Milan Milutinovic, non coupable (...) et ordonne que vous soyez immédiatement libéré», a déclaré le juge Iain Bonomy en prononçant le premier jugement du TPI contre des Serbes accusés de crimes au Kosovo.

M. Milutinovic, 66 ans, président de Serbie entre 1997 et 2002, était accusé de déportation, transferts forcés, meurtres et persécutions, des crimes contre l'humanité et un crime de guerre.

Le président kosovar, Fatmir Sejdiu, a affirmé jeudi à Washington sa «pleine confiance» dans le TPI. «Mais dans le même temps, je veux souligner que chaque jugement doit être analysé le mieux posssible», a ajouté le président kosovar.

Il a rappelé que les crimes commis pendant la guerre de l'ex-Yougoslavie l'ont été «par ceux qui dirigeaient la politique à ce moment-là».

Le Parti socialiste (SPS) de Slobodan Milosevic a qualifié de son côté d'«injustes» les condamnations, estimant que «ceux qui défendaient leur pays et leur peuple contre l'agression ont été condamnés».

En tant que président de la Serbie, «Milutinovic n'avait pas de contrôle individuel direct» sur les forces serbes combattant la rébellion de l'Armée de libération du Kosovo (UCK), a dit le juge.

L'Armée yougoslave (VJ) et la police serbe «ont causé la départ du Kosovo d'au moins 700.000 Albanais kosovars pendant une période de courte durée, entre mars et juin 1999», alors que l'Otan bombardait la Serbie et le Kosovo, a rappelé le juge Bonomy.

«Dans la pratique, c'était (Slobodan) Milosevic (...) qui exerçait le véritable commandement», a-t-il poursuivi. L'ancien président yougoslave, mort en mars 2006 dans sa cellule à La Haye avant la fin de son procès devant le TPI, était notamment poursuivi pour son rôle dans la guerre du Kosovo.

L'ancien vice-Premier ministre de la République fédérale de Yougoslavie (RFY) Nikola Sainovic a été condamné à 22 ans de prison, comme Nebojsa Pavkovic, ancien chef de l'état-major de l'armée, et Sreten Lukic, chef de la police serbe au Kosovo, pour des crimes contre l'humanité et un crime de guerre.

Le procureur avait requis des peines allant de 20 ans à la réclusion à perpétuité contre les six hommes, qui avaient plaidé non coupables lors de leur procès, tenu du 10 juillet 2006 au 27 août 2008.

L'accusation a réussi à prouver leur «intention de forcer la population des Albanais du Kosovo à l'exode afin d'assurer le maintien du contrôle» de Belgrade sur la province, selon le juge.

Deux autres accusés, Dragoljub Ojdanic, autre ancien chef de l'état-major de l'armée yougoslave, et le général Vladimir Lazarevic, qui dirigeait les opérations de l'armée à Pristina, ont été condamnés à 15 ans de prison, pour déportations et transferts forcés.

Le juge a estimé que l'armée et la police avaient utilisé le prétexte des bombardement de l'Otan pour terroriser la population en tuant des civils, violant des femmes et brûlant des maisons.

En juin 1999, les forces serbes se sont retirées du Kosovo, après onze semaines de bombardements de l'Otan. La province a alors été placée sous administration de l'ONU et une force multinationale commandée par l'Otan y a été déployée. Le 17 février 2008, les autorités kosovares albanaises ont proclamé l'indépendance du Kosovo, rejetée par Belgrade.