La Pologne était sous le choc lundi après la décapitation par les talibans pakistanais d'un ingénieur, Piotr Stanczak, le premier Polonais jamais exécuté par des islamistes depuis l'engagement de forces polonaises en Afghanistan et en Irak.

«Jamais en Pologne nous n'avions eu affaire à ce genre de situation», a déclaré à la télévision le conseiller du premier ministre à la sécurité Jacek Cichocki.

«On voyait des films concernant des ressortissants d'autres pays, des Américains, des Britanniques, mais pas de Polonais».

Le ministre des Affaires étrangères, Radoslaw Sikorski, venait d'annoncer que «le pire» était confirmé après l'authentification d'une vidéo diffusée la veille par les talibans et présentée comme étant l'enregistrement de l'exécution de l'ingénieur.

«Maintenant que nous ne pouvons plus sauver notre compatriote, nous allons nous efforcer de punir ses assassins», a affirmé le ministre, expliquant qu'après des consultations avec son collègue de la Justice, Varsovie lancerait des mandats d'arrêt à l'encontre des suspects.

Des militants du Mouvement des talibans pakistanais, lié à Al-Qaeda, ont diffusé dimanche la vidéo, visionnée par l'AFP, de la décapitation de l'otage polonais qu'ils affirmaient avoir tué parce qu'Islamabad refusait de libérer des rebelles détenus.

Selon le gouvernement polonais, parmi ces quatre rebelles figurait l'assassin du journaliste américain Daniel Pearl, exécuté en 2002 au Pakistan. Les ravisseurs exigeaient aussi que Varsovie retire ses 1.600 militaires déployés en Afghanistan.

Piotr Stanczak, 42 ans, père d'un garçon de 13 ans, avait été capturé le 28 septembre dans le nord-ouest du Pakistan. Il travaillait pour une compagnie polonaise de prospection géophysique Geofizyka Krakow.

La nouvelle de sa mort faisait lundi la Une de tous les journaux nationaux, dont certains diffusaient une image de la vidéo le montrant entouré de deux de ses ravisseurs armés.

«On a tué un Polonais» clamait le quotidien conservateur Rzeczpospolita, «Tué ! Les talibans ont assassiné un Polonais» titrait le grand quotidien de qualité Gazeta Wyborcza (centre-gauche), et faisait témoigner la soeur de la victime.

«Les crapules, ils ont tué un Polonais», affichait sur une première page noire ornée d'un bandeau de deuil le tabloïd Fakt.

Mais au-delà des titres, les commentaires commençaient déjà à poser la question de la façon dont le gouvernement du premier ministre Donald Tusk a traité la crise.

«Le gouvernement polonais, a-t-il tout fait ?», s'interrogeait Gazeta Wyborcza. «Les autorités polonaises ont-elles quelque chose à se reprocher ?», demandait Rzeczpospolita.

«L'opinion publique a accordé une très grand confiance à la diplomatie polonaise et aux services sur la question du Polonais enlevé. Il est temps de vérifier quel usage a été fait de cette confiance», avertissait Dziennik (centre-droite).

Plusieurs étrangers se trouvent entre les mains de ravisseurs au Pakistan.

Le 2 février, l'Américain John Solecki, chef de l'antenne du Haut-Commissariat de l'ONU pour les Réfugiés (HCR) dans la province du Baloutchistan (sud) a été kidnappé par des hommes armés.

Un diplomate iranien, le consul général d'Afghanistan à Peshawar, ainsi qu'une journaliste canadienne ont également été enlevés dans le nord-ouest à l'automne et n'ont pas été libérés à ce jour.