La Russie a annoncé jeudi l'arrêt des livraisons de gaz à l'Ukraine après l'échec de négociations entre les compagnies gazières des deux pays, obligeant l'UE à s'interroger sur sa sécurité énergétique car ses approvisionnements transitent par le territoire ukrainien.

Le président ukrainien Viktor Iouchtchenko a pourtant estimé qu'un compromis était proche et qu'un contrat pourrait être signé «avant le 7 janvier» pour fixer le prix du gaz russe pour l'Ukraine en 2009 et régler la question du remboursement de la dette ukrainienne, les deux points au coeur de l'actuel conflit gazier.«J'estime que nous sommes proches d'un compromis et je demande au président russe, au Premier ministre russe et aux négociateurs ukrainiens (...) de faire tout leur possible pour que ces pourparlers s'achèvent le plus vite possible», a déclaré M. Iouchtchenko dans un communiqué.

Il a souligné jeudi que le tarif du transit de gaz vers l'Union européenne payé par Moscou à Kiev devait augmenter si le prix du gaz destiné à l'Ukraine était revu à la hausse.

La Russie a proposé mercredi un prix de 250 dollars les 1.000 mètres cubes de gaz sans hausse du tarif de transit (1,7 dollar pour 1.000 m3 transportés sur une distance de 100 km), une offre inacceptable pour la partie ukrainienne.

La société énergétique ukrainienne Naftogaz a indiqué avoir proposé de payer 235 dollars en échange d'une augmentation de 10 cents du tarif de transit.

Le PDG de Gazprom Alexeï Miller s'est montré intransigeant jeudi, estimant que comme Kiev avait rejeté sa proposition, l'Ukraine devra payer en 2009 le tarif facturé aux pays européens.

«Etant donné que l'Ukraine a rejeté les conditions tarifaires préférentielles de 250 dollars, Gazprom procédera aux livraisons de gaz à l'Ukraine à partir de janvier au prix européen de 418 dollars pour 1.000 m3», a déclaré M. Miller.

Faute d'un accord mercredi sur le prix, et Kiev n'ayant pas remboursé la totalité d'une dette de deux milliards de dollars à Gazprom, aucun contrat pour 2009 n'a encore été signé et la Russie a cessé les livraisons de gaz à l'Ukraine jeudi à 07h00 GMT.

Par contre, Naftogaz et Gazprom ont tous les deux assuré qu'ils rempliraient leurs obligations envers les pays de l'Union européenne (UE) et que leur approvisionnement ne serait pas menacé.

Les Européens suivent ce conflit de près, car en janvier 2006, lors de la précédente crise gazière russo-ukrainienne, les livraisons avaient été affectées. Moscou accusait Kiev de siphonner le gaz transitant par l'Ukraine.

La Russie fournit environ un quart du gaz consommé dans l'UE et compte pour 40% des importations de l'Union, dont la majeure partie passe par l'Ukraine.

La présidence tchèque de l'UE et la Commission européenne ont appelé jeudi à la poursuite des négociations «et à trouver rapidement une issue positive afin que la fourniture de gaz à l'Europe ne soit pas affectée».

Washington a aussi appelé Russes et Ukrainiens à négocier pour résoudre leur différend.

Aucun pays européen client de la Russie n'avait constaté jusqu'à jeudi soir de baisse de son approvisionnement. Kiev a pour sa part indiqué disposer de réserves suffisantes pour tenir cet hiver.

«Tous les consommateurs ukrainiens sont pourvus» en gaz, a déclaré Naftogaz qui dispose de 17 milliards de mètres cubes de gaz stocké dans des réservoirs souterrains.

Russes et Ukrainiens se sont aussi déclarés prêts à reprendre les pourparlers, mais ils s'accusent mutuellement d'empêcher la reprise des négociations.

«Nous collègues ukrainiens ne sont pas venus négocier» jeudi, a déclaré le porte-parole de Gazprom, Sergueï Kouprianov.

«Si l'autre partie est prête à une discussion normale et tolérante, nous sommes prêts à nous envoler» pour Moscou, a rétorqué le patron de Naftogaz, Oleg Doubina.

La Russie présente cette dispute gazière comme un problème commercial, bien que ses relations avec l'Ukraine soient difficiles, en particulier depuis une «révolution» pro-occidentale chez son voisin fin 2004.