La Slovaquie est devenue dans la nuit de mercredi à jeudi le 16e pays de l'Union européenne à adopter l'euro en remplacement de sa monnaie, la couronne.

«Un adieu peut aussi être beau, comme le dit une chanson slovaque, et c'est ce que nous vivons aujourd'hui», a déclaré le Premier ministre de gauche Robert Fico, avant de retirer des euros dans un distributeur installé pour l'occasion au parlement slovaque.

A Bratislava, environ 100 000 badauds, dont de nombreux touristes, se sont rassemblés mercredi vers minuit sur la place principale pour voir un grand feu d'artifice aux couleurs européennes marquer à la fois le changement d'année, le passage de l'ancien pays communiste à l'euro et le dixième anniversaire de la monnaie européenne.

«Beaucoup payent déjà en euros», a déclaré Lucia, une vendeuse de rue de 24 ans, qui offrait par un froid glacial son vin chaud à 1,5 euros le verre.

Deux étudiants, David and Laco, sillonaient la foule colorée et joyeuse, en offrant leurs baisers un euro pièce tandis qu'un orchestre tzigane jouait à la tribune l'air des adieux.

Mercredi, les magasins de Bratislava étaient bondés de clients venus dépenser leurs dernières couronnes pour les soldes d'après Noël. Ces derniers jours, beaucoup ont aussi déposé leurs économies en banque pour éviter toute opération de change.

«Le secteur banquier est bien préparé, mais les gens devront être patients s'il y a des queues dans les banques pour changer l'argent», a déclaré à l'AFP Jana Kovacova, la porte-parole de la banque centrale slovaque (NBS).

Comme Chypre, Malte et la Slovénie, la Slovaquie a opté pour un scénario de «big-bang» avec une période de double circulation réduite à quinze jours, les autorités espérant que la plus grande partie du liquide sera échangée en une semaine, comme l'explique le site officiel www.euromena.sk.

Certains commerçants ont décidé de garder boutique close jusqu'au 16 janvier, quand les paiements se feront seulement en euro et que la couronne, en vigueur depuis l'indépendance du pays, en 1993, après la partition amiable de la Tchécoslovaquie, sera retirée de la circulation.

Le gouvernement espère que la monnaie unique permettra d'amortir les effets de la crise et de préserver le rythme vigoureux du développement économique.

Déjà, le pays qui a lancé le processus monétaire dès son intégration à l'Union européenne en 2004 peut se féliciter d'avoir bouclé ses négociations avec Bruxelles avant le grand effondrement boursier de septembre et d'avoir obtenu un taux favorable de change de 30,126 couronnes pour un euro.

Ses voisins post-communistes comme la Hongrie, la Pologne ou la République tchèque qui n'ont pas pu - ou pas voulu- opter pour une euro-adhésion aussi rapide, ont vu ces dernières semaines leur monnaie nationale glisser par rapport à la devise européenne.

La Slovaquie a pu s'aligner avant eux sur les critères de Maastricht grâce aux grandes réformes menées par le précédent gouvernement libéral. Après une croissance record de 10,4% en 2007, l'économie, qui repose essentiellement sur l'automobile et l'électronique, reste une des plus performantes d'Europe, avec un résultat enviable de 7,4% attendu pour 2008.

Contrôler l'inflation (4,9% en novembre en données annuelles) reste le principal souci du gouvernement qui a mis en place un système de contrôle des prix, notamment dans le secteur de l'énergie.

Assez réticente au départ, la population s'est peu à peu laissée convaincre: 58% des Slovaques sont favorables à l'euro mais en même temps 65 % craignent que le changement de monnaie entraîne des hausses de prix.

L'écart de niveau de vie entre la Slovaquie et l'Europe occidentale s'est réduit depuis la chute du communisme en 1989, mais il reste du chemin à parcourir: le PIB par habitant représentait à 68,5% de la moyenne européenne en 2007, selon Eurostat.