Moscou et Kiev ne sont pas parvenus à un accord dans la crise gazière qui les oppose et la Russie va cesser ses livraisons de gaz à l'Ukraine dans la matinée de jeudi, faisant craindre des perturbations dans l'approvisionnement de l'Europe.

«À partir de 10H00 Gazprom va entièrement, à 100%, cesser les livraisons de gaz à l'Ukraine», a déclaré le PDG du géant russe du gaz Gazprom Alexeï Miller un peu plus de deux heures avant minuit, heure limite fixée par la Russie pour résoudre la crise. «Toute la responsabilité revient à la partie ukrainienne», a ajouté M. Miller au cours d'une conférence de presse à Moscou à l'issue de vaines négociations.

«Nous avons l'impression qu'il y a en Ukraine des forces politiques qui ont intérêt à ce qu'il y ait un conflit du gaz entre les deux pays», a affirmé le patron de Gazprom. «En l'absence de contrat signé, Gazprom n'a aucune raison juridique de livrer du gaz hors de ses frontières».

Le porte-parole de la société d'État ukrainienne des hydrocarbures Naftogaz, Valentin Zemlianski, a confirmé que les négociations étaient terminées. «La délégation rentre à Kiev ce soir», a-t-il déclaré.

Gazprom avait prévenu que l'or bleu cesserait d'être livré à l'Ukraine jeudi à 07h00 si un nouveau contrat n'était pas signé le 31 décembre. Or le groupe russe réclamait le paiement de plus de 2 milliards de dollars d'arriérés avant de parapher ce nouvel accord.

Lors de la précédente crise gazière russo-ukrainienne, en janvier 2006, les exportations vers l'Europe avaient été affectées et Moscou avait accusé Kiev de voler le gaz transitant par son territoire.

Naftogaz a cependant assuré mercredi que l'Ukraine garantirait le transit du gaz russe par son territoire. Interrogé par l'AFP pour savoir si la société assurerait le transit du gaz russe après l'échec des négociations, son porte-parole a répondu: «oui, naturellement».

«L'Europe recevra tout le gaz que lui fournira la Russie», a aussi affirmé à l'AFP le représentant de la présidence pour la sécurité énergétique Bogdan Sokolovski.

Kiev a plusieurs fois assuré ces derniers jours qu'elle ne siphonnerait pas le gaz destiné aux Européens, alors que 80% des livraisons gazières russes à l'Europe transitent par l'Ukraine.

Gazprom avait affirmé plus tôt dans la journée avoir reçu une lettre de la compagnie ukrainienne Naftogaz selon laquelle Kiev menacerait de puiser dans le gaz russe transitant sur son territoire si les exportations à l'Ukraine cessaient.

Selon le groupe russe, le société ukrainienne Naftogaz doit 805,8 millions de dollars pour les livraisons gazières de novembre, 862,3 millions pour celles de décembre et 450 millions de pénalités de retard de paiement.

Mais Naftogaz a annoncé qu'elle ne verserait plus rien à Gazprom cette année, jugeant que les 1,5 milliard de dollars réglés la veille était suffisants, dans l'attente d'un «arbitrage» sur le montant des pénalités.

Autre sujet de discorde entre Kiev et Moscou, le prix du gaz réclamé par la Russie en 2009.

M. Poutine a indiqué que Gazprom avait proposé un tarif de 250 dollars pour 1 000 mètres cubes de gaz, contre 179,5 dollars en 2008.

L'Ukraine a rejeté cette offre, qui reste pourtant inférieure au prix du marché, estimant que si le coût du gaz augmentait, alors il fallait aussi réévaluer à la hausse le tarif de transit gazier par l'Ukraine.

«La proposition de la partie russe est inacceptable. Ce prix est clairement exagéré si l'on maintient le tarif» du transit actuel, a déclaré le représentant de la présidence ukrainienne pour la sécurité énergétique, Bodgan Sokolovski.

L'Ukraine dit avoir du mal à régler ses factures en raison de la crise économique mondiale qui a notamment provoqué une chute de sa monnaie et une baisse drastique de ses exportations.

La Russie présente cette dispute gazière comme un problème commercial, bien que ses relations avec l'Ukraine soient difficiles depuis une révolution pro-occidentale fin 2004.