Nicolas Sarkozy n'a pas obtenu vendredi totalement gain de cause dans son combat contre une poupée vaudou à son effigie, la justice décidant de ne pas interdire sa commercialisation, même si elle a jugé qu'elle portait atteinte à la dignité du président français.

«Grandement soulagée», la société Tear Prod a d'ores et déjà annoncé un nouveau tirage de 20.000 exemplaires.

Le 29 octobre, le tribunal de grande instance de Paris, saisi d'une demande d'interdiction du «Manuel vaudou, Nicolas Sarkozy» - un coffret comprenant un ouvrage humoristique sur le chef de l'État, une poupée à son effigie et un lot de 12 aiguilles - avait débouté le chef de l'État.

Vendredi, la cour d'appel de Paris a confirmé qu'il n'y avait «pas lieu d'interdir la poupée», cette mesure n'étant, selon elle, «pas proportionnée».

Toutefois elle a infirmé le jugement de première instance en estimant «que l'incitation du lecteur à piquer la poupée (...) action que sous-tend l'idée d'un mal physique, serait-il symbolique, constitue une atteinte à la dignité de la personne de M. Sarkozy».

«La caricature et la satire, même délibérément provocantes ou grossières, participent de la liberté d'expression», a-t-elle relevé. Mais «il n'en demeure pas moins une limite, toute personne, quelles que soient ses fonctions, ayant droit à la protection des atteintes à la dignité de sa personne».

Ils ont donc enjoint la société Tear Prod, qui édite le livret, «d'apposer au besoin par un bandeau, sur tout coffret mis en vente ou proposé à quelque titre que ce soit au public, la mention» de la condamnation.

L'éditeur devra également verser au président un euro de dommages et intérêts.

En première instance, les magistrats avaient estimé que la poupée litigieuse «ne constitu(ait) ni une atteinte à la dignité humaine, ni une attaque personnelle», mais un gadget s'inscrivant «dans les limites autorisées de la liberté d'expression et du droit à l'humour».

Ils avaient surtout estimé que «nul ne p(ouvai)t prendre au sérieux ce procédé et croire qu'il prônerait un culte vaudou tel que pratiqué aux Antilles».

L'avocat de Nicolas Sarkozy, Me Thierry Herzog, devrait s'entretenir avec son client «des suites à donner à cette affaire». Il pourrait décider d'engager une action au civil et réclamer des dommages et intérêts supplémentaires à Tear Prod.

Vendredi, l'avocat s'est déclaré «tout à fait satisfait» de cet arrêt «qui a permis que la loi soit rappelée».

La poupée, en vente depuis le 9 octobre, est bardée d'expressions qui ont jalonné la vie politique de Nicolas Sarkozy, du mot «racaille», dont il avait qualifié des jeunes de banlieues défavorisées, au «Casse-toi pauv'con» lancé au salon de l'Agriculture à un homme qui refusait de lui serrer la main.

Cette procédure judiciaire est la sixième engagée par Nicolas Sarkozy depuis son arrivée à l'Elysée. En février le président Sarkozy et son épouse Carla Bruni-Sarkozy avaient obtenu la condamnation de la compagnie aérienne Ryanair qui avait utilisé la photo du couple dans une publicité.

Mais il s'agissait de la première action en justice de Nicolas Sarkozy contre un éditeur.

A côté du coffret bleu Nicolas Sarkozy, tiré à 20.000 exemplaires, Tear Prod a également mis en vente un coffret rouge Ségolène Royal, l'ex-candidate socialiste à la présidentielle, tiré à 12.000 exemplaires.

Cette dernière avait ironisé sur l'action en justice de Nicolas Sarkozy. «J'ai le sens de l'humour moi, je ne porte pas plainte contre ma poupée vaudou», avait-elle lancé.