L'élection contestée de Martine Aubry à la tête du parti socialiste avec 42 voix d'avance sur Ségolène Royal a plongé samedi le deuxième parti de France en pleine crise de nerfs, un scénario catastrophe qui ravit la majorité de droite en vue de la présidentielle de 2012.

Le camp de Martine Aubry, 58 ans, ancienne ministre architecte de la loi sur les 35 heures de travail par semaine et tenante de l'ancrage à gauche du parti, a affirmé, après une nuit de suspense et de confusion qu'elle était élue Premier secrétaire du parti.La direction du PS a fait état de 42 voix d'avance sur 137 000 votes (50,02% contre 49,98%) pour Martine Aubry, fille de l'ancien président de la Commission européenne Jacques Delors.

Mais ce résultat très serré a aussitôt été vivement contesté par le camp adverse de l'ancienne candidate à la présidentielle de 2007 Ségolène Royal, 55 ans, qui prône un «renouveau» sans exclure une alliance avec le centre. Les pro-Royal ont dénoncé des «tricheries» et demandé un nouveau vote.

Désireux de calmer les esprits, François Hollande, actuel Premier secrétaire et ancien compagnon de Ségolène Royal, a annoncé qu'un Conseil national serait convoqué «en milieu de semaine prochaine» pour «valider» le résultat.

«Il y a des contestations. Le mieux pour que le résultat soit le plus incontestable possible est qu'il soit ratifié par un Conseil national», a affirmé le chef du PS, assurant que «toutes les voies de recours possibles vont être examinées».

En attendant, les deux camps s'invectivent, donnant le spectacle d'un parti profondément déchiré après des mois de luttes d'influence qui se sont soldés par l'échec du PS à voter un projet commun lors du

«Il y a un climat de crise qu'il ne faut pas nier, donc il faut trouver des solutions pour régler cette crise», a relevé le député François Lamy, l'un des proches de Martine Aubry.

Pour lui, l'ex-ministre est «incontestablement la gagnante» du vote des militants socialistes, et devrait donc «logiquement être désignée» à la tête du parti.

Martine Aubry a elle appelé à «une attitude de responsabilité car sinon, cela va créer une situation encore pire pour notre parti».

«Tricherie», rétorque le camp de Ségolène Royal qui réclame un nouveau vote, faisant, comme le député Manuel Valls, le parallèle avec l'imbroglio de l'élection présidentielle américaine en 2000 ayant opposé George W. Bush et Al Gore, dans l'Etat de Floride où les résultats avaient été serrés et contestés.

«Je suis effrayé par le spectacle terrible que nous donnons depuis quelques jours. C'est une volonté d'écarter Ségolène Royal depuis des mois», a affirmé M. Valls sur la radio France Info.

Ségolène Royal, arrivée en tête du premier tour avec 42,9% contre 34,5% pour Martine Aubry, avait dénoncé au cours de la nuit des «méthodes de l'appareil du parti totalement insupportables».

A droite, les porte-parole de l'UMP (parti au pouvoir) ironisaient sur «le talent d'auto-destruction du PS». Le PS «a implosé», a estimé l'un d'eux, notant «un parti affaibli et coupé en deux, avec deux camps qui ne se respectent pas... pire, qui se haïssent!"

Déstabilisé par la politique «d'ouverture» du président Nicolas Sarkozy, qui a recruté plusieurs personnalités socialistes dans son gouvernement, le PS a peiné depuis 2007 à faire entendre un discours d'opposition.

Il a été fort peu présent, à l'exception de Mme Royal, dans le débat sur la crise financière.

A court terme, «ce bordel généralisé au PS est plutôt une très bonne chose pour nous», s'amuse un parlementaire UMP, certains y voyant une réélection assurée pour Nicolas Sarkozy en 2012.

Reste qu'à moyen et long terme, la droite aura aussi besoin d'une opposition «structurée», pour éviter, résume le député UMP Benoist Apparu, «des troisièmes voies que représenteraient celle de (François) Bayrou, au centre, ou celle de (Olivier) Besancenot, à l'extrême gauche».