Duel de dames, opposition de styles au Parti socialiste français, et heure de vérité pour Ségolène Royal: les militants votent de nouveau vendredi pour désigner une dirigeante qui devra panser les plaies de la division et redonner consistance à l'opposition au président Sarkozy.

«Les militants ont déjà marqué profondément leur volonté de changement», a déclaré Mme Royal vendredi au lendemain du premier tour qui l'a placée en tête, se disant confiante avant un second tour très incertain.

«Nous sommes la garantie de ce changement, de cet ancrage à gauche, mais aussi de l'ouverture sur toutes les idées neuves» au Parti socialiste, a ajouté l'ex-candidate à la présidentielle, qui a beaucoup misé sur son accession à la tête du parti.

Consultés quatre jours après un congrès qui a échoué à présenter une ligne claire et une candidature de consensus pour la succession de François Hollande à la tête du parti, les militants socialistes n'ont pas départagé suffisamment les deux favorites et rivales, Mme Royal (42,51% des suffrages) et l'ex-ministre Martine Aubry (34,70%).

Les 230 000 militants socialistes doivent donc s'exprimer à nouveau vendredi soir (de 16H00 à 21H00 GMT) dans un second tour à l'issue incertaine du fait des reports attendus de suffrages en faveur de Mme Aubry, et de l'incertitude sur la mobilisation des abstentionnistes, potentiellement favorables à Mme Royal.

Ségolène Royal, 55 ans, ex-compagne de François Hollande, qui affirme incarner un «renouveau» du parti avec le soutien des militants, compte bénéficier pour l'emporter de la «dynamique» qu'elle incarne depuis qu'elle a affronté Nicolas Sarkozy à la dernière élection présidentielle.

Mais sa rivale Martine Aubry, 58 ans, maire de Lille (nord) et auteur de la réforme des 35 heures de travail hebdomadaire alors qu'elle était ministre de l'Emploi, compte sur le report «arithmétique» des suffrages obtenus au premier tour par le jeune (41 ans) Benoît Hamon (22,79%), pour l'emporter.

M. Hamon, dont la candidature incarnait la jeune garde de la gauche du parti a en effet appelé à voter «massivement» pour Martine Aubry.

Passées toutes deux par de l'Ecole nationale d'administration (ENA), le creuset des élites françaises, Mmes Royal et Aubry sont également toutes deux d'anciennes ministres. Pour le reste, beaucoup les oppose.

Le style austère de Mme Aubry tranche avec la touche «glamour» de Mme Royal. La première s'inscrit dans la continuité des structures du parti, quand la seconde compte le bouleverser dans une démarche «participative» offrant davantage la parole à la «base».

Et Mme Aubry a exclu toute alliance nationale avec le centre, alors que Ségolène Royal se refuse à l'exclure.

«Quel que soit le vainqueur, le Parti socialiste sera coupé en deux. D'un côté la ligne Aubry-Hamon (avec) un socle idéologique assez confus. De l'autre la famille "royaliste"», observait vendredi matin le quotidien de droite Le Figaro.

La tâche première de la nouvelle direction du parti sera donc de mettre une sourdine aux querelles et aux rivalités qui minent la principale formation d'opposition du pays. L'électorat est déçu et pourrait se reporter sur le centre ou l'extrême-gauche.

Déstabilisé par la politique «d'ouverture» de Nicolas Sarkozy, qui a recruté plusieurs personnalités socialistes dans son gouvernement, le PS a peiné depuis 2007 à faire entendre un discours d'opposition.

Il a été fort peu présent, à l'exception de Mme Royal, dans le débat sur la crise financière, au moment où le président Sarkozy multipliait les initiatives.

Et les dernières mesures annoncées par le président de droite, comme la création d'un fonds souverain pour soutenir l'industrie du pays, n'ont guère suscité de commentaires d'un parti entièrement investi dans ses querelles internes.