Les électeurs de Bavière ont infligé dimanche une défaite historique aux conservateurs de la CSU, l'alliée du parti CDU de la chancelière Angela Merkel, lui faisant perdre la majorité absolue qu'elle détenait dans cet État régional depuis 46 ans.

L'Union chrétienne-sociale (CSU), parti-frère bavarois de l'Union chrétienne-démocrate (CDU), a chuté de 17 points à 43,6% des suffrages, contre 60,7% en 2003, selon des estimations diffusées à 14H00 HAE.

L'effondrement de la CSU n'a pas profité au Parti social-démocrate SPD, adversaire traditionnel des conservateurs mais partenaire de Mme Merkel à Berlin. Avec 18,7%, le SPD régresse même par rapport 2003 (19,6%).

En revanche les petites formations, en particulier le Parti libéral FDP, les Verts et les «sans étiquette» ont enregistré des gains significatifs.

«Nous n'avons pas atteint notre cible», qui était de franchir la barre des 50%, a admis le chef de la CSU Erwin Huber, évoquant «un jour douloureux et difficile» pour son parti.

«Nous avons fait pire que tout ce qu'on pouvait imaginer», a constaté le chef du gouvernement régional sortant G-nther Beckstein: les électeurs ont obligé le parti à former une coalition pour continuer à gouverner et «il va falloir avaler la pilule».

La CSU obtiendrait 88 sièges au parlement régional de ce riche État, contre 124 en 2003.

Le FDP, qui revient au parlement de Bavière après 14 ans d'absence, avec 8,1% des suffrages (21 sièges), s'est dit ouvert à des négociations avec la CDU. «C'est le meilleur résultat que notre parti ait jamais obtenu en Bavière», s'est félicité Guido Westerwelle, le président du parti.

Mais la CSU pourrait aussi s'allier aux «sans étiquette», qui obtiennent plus de 10% des voix et 15 sièges.

En dépit du maigre score du SPD, Frank-Walter Steinmeier, le chef de la diplomatie récemment désigné candidat à la chancellerie pour les élections législatives de l'automne 2009, a célébré «un tremblement de terre», «un résultat qui changera le paysage politique bien au-delà de la Bavière».

Le secrétaire général de la CDU, Ronald Pofalla, a admis la «défaite amère» de la CSU mais souligné que le SPD avait, lui, réalisé «son plus mauvais résultat depuis que la Bavière vote».

Le SPD est le seul à ne pas profiter de la chute de la CSU. L'extrême gauche Die Linke a rassemblé 4,4% des voix, ratant de peu la barre des 5% nécessaire pour siéger au parlement régional. «C'est sensationnel», s'est félicité Dietmar Bartsch, un dirigeant de ce parti formé d'anciens communistes et des déçus de la social-démocratie.

«C'est un jour noir pour la CSU et une bonne journée pour la Bavière», a lancé une responsable des Verts, Margarete Bause, dont la formation est passée de 7,7% à 9% des suffrages (18 sièges).

De la taille de l'Irlande mais avec un PIB double et un taux de chômage de 4% (7,6% en Allemagne), la Bavière héberge un tiers des entreprises du Dax, le principal index boursier allemand.

La CSU et «l'État libre de Bavière» ont été longtemps synonymes. Mais le Land des brasseries et des culottes de peau, du Bayern Munich et de BMW a changé.

Selon la plupart des commentateurs, l'usure du pouvoir et la modernisation spectaculaire de cette région longtemps très agricole ont entraîné une désaffection des électeurs. Une série de décisions impopulaires y ont contribué, d'une loi anti-fumeurs très restrictive aux questions environnementales, ignorées alors qu'elles préoccupent l'électorat.

L'effondrement de la CSU pèsera à Berlin où la chancelière Merkel espère obtenir aux législatives de 2009 une majorité lui permettant de cesser sa «grande coalition» avec les sociaux-démocrates.

«Les prochains mois s'annoncent passionnants non seulement en Bavière mais mais aussi au niveau fédéral», commentait le quotidien économique Handelsblatt à paraître lundi. La CDU de Mme Merkel «ne peut plus compter pouvoir compenser les faibles résultats dans le nord avec le réservoir de voix du sud».