Le Premier ministre britannique Gordon Brown, qui a tenté cette semaine de relancer sa popularité en berne lors du congrès travailliste à Manchester (nord-ouest), compte aussi sur une nouvelle arme secrète: sa discrète épouse, Sarah, de plus en plus visible à ses côtés.

Signe de cette montée en puissance, c'est Sarah Brown elle-même qui, rompant avec la tradition, a pris la parole avant son mari mardi devant les délégués travaillistes. Elle a dit sa fierté d'être Mme Brown, l'a appelé au pupitre et l'a embrassé sur la bouche au passage, sous un tonnerre d'applaudissements.Jeudi, Mme Brown, 44 ans, était photographiée aux côtés de la candidate républicaine à la vice-présidence américaine, Sarah Palin, lors d'un dîner caritatif à New York, où son mari participait à l'Assemblée générale de l'ONU.

«Elle est plus désarmante qu'un bataillon de Casques bleus de l'ONU et le parti travailliste devrait la faire monter au créneau», commentait récemment l'écrivain australienne Kathy Lette, qui la connaît depuis 20 ans.

Le Labour, parcouru depuis plusieurs mois de rumeurs de putsch contre son patron, est à la traîne dans les sondages, loin derrière les Conservateurs du jeune David Cameron, 41 ans. Un sondage par internet pour l'institut YouGov, mené après le discours réussi de M. Brown, et publié jeudi par le tabloïd The Sun montre toutefois un frémissement: le Labour n'enregistre plus «que» 10 points de retard sur les Tories, contre 15 à 28 selon de récentes enquêtes.

Plusieurs commentateurs estiment que Sarah Brown pourrait aider à donner une image plus chaleureuse et plus humaine de son mari, de 13 ans son aîné, considéré comme un intellectuel aride et un peu froid.

«Sarah Brown est un atout phénoménal pour Gordon», écrit Zoe Williams dans le Guardian (gauche). «Elle le fait paraître humain, elle donne l'impression qu'il est sincère quand il sourit, elle donne l'impression qu'il gagne à être connu, elle donne envie de lui faire confiance, parce qu'elle-même lui fait confiance.»

Ses rares déclarations publiques laissent entrevoir un sens de l'humour parfois teinté d'une dose rafraîchissante d'autodérision.

Critiquée pour son peu d'élégance vestimentaire lors de sa rencontre en mars dernier à Downing Street avec la Première dame de France, Carla Bruni-Sarkozy, Sarah Brown avait ainsi lâché: «Je n'avais aucune chance, n'est-ce pas? Je me retrouvais à côté d'un top-model. Alors peu importe ce que je portais...»

Sarah et Gordon Brown, mariés en 2000, avaient ému les Britanniques un an plus tard après la mort de leur premier enfant, Jennifer, dix jours après sa naissance prématurée.

En 2003, Sarah Brown donnait la vie à un petit John. Gordon Brown se laissait alors aller à une rare manifestation d'émotion publique: «Je suis père et c'est ce qui compte le plus. Rien n'est plus important, absolument rien».

Leur deuxième enfant, Fraser, né en 2006, souffre quant à lui de mucoviscidose, une maladie génétique mortelle.

Mme Brown avait quitté après son mariage la société de relations publiques qu'elle a co-fondée. Elle s'occupe depuis de défendre la cause des femmes et des enfants en soutenant des associations caritatives.

«Le soutien passionné de Sarah Brown à son mari sur la tribune du congrès (du Labour) mardi lui interdit désormais d'essayer de se faire passer pour l'épouse loyale et discrète d'un homme politique», écrivait jeudi Elizabeth Grice dans le Daily Telegraph. Son apparition à la tribune du Labour «n'a pas seulement galvanisé les délégués du parti travailliste, elle l'a également rendue essentielle pour la survie (de son mari), voire pour celle du Labour lui-même».