Un juge de Washington a ordonné jeudi qu'un avion renvoyant chez elles une mère et sa fille ayant demandé l'asile aux États-Unis rebrousse chemin, et a menacé le ministre américain de la Justice de le poursuivre pour outrage à magistrat, a indiqué une ONG.

Les deux migrantes avaient porté plainte pour contester leur expulsion vers le Salvador, et une audience consacrée à leur requête s'est tenue jeudi, a expliqué l'ACLU, la puissante organisation de défense des droits civiques, qui a déposé la plainte en leur nom.

Selon l'ONG, le juge avait bloqué leur expulsion en attendant d'examiner l'affaire.

Mais « alors que nous étions devant la cour, nous avons appris que le gouvernement avait expulsé une cliente et son jeune enfant à peine quelques heures auparavant, mettant leurs vies en danger », a affirmé l'ACLU dans une série de tweets. « Cela contredit l'engagement du gouvernement devant la cour selon lequel PERSONNE ne serait expulsé avant le lendemain au plus tôt ».

« Le juge a ordonné au gouvernement de faire rebrousser chemin à l'avion et de ramener la mère demandeuse d'asile et son enfant aux États-Unis », a-t-elle ajouté. Et « il a dit que si le problème n'était pas résolu, il envisagerait des poursuites pour outrage à magistrat - visant pour commencer le ministre de la Justice » Jeff Sessions.

Cité par le Washington Post, le juge Emmet G. Sullivan a qualifié la décision du gouvernement de les expulser de « scandaleuse ».

« Que quelqu'un qui cherche à obtenir justice aux États-Unis soit expulsé pendant que ses avocats plaident en sa faveur? (...). Je ne suis pas du tout content. C'est inacceptable », a dit le magistrat.

Selon un responsable du ministère de la Sécurité intérieure cité par la chaîne NBC News, l'avion n'a pas pu rebrousser chemin mais Carmen - un pseudonyme - et sa fille mineure n'ont pas quitté l'avion à l'atterrissage et vont être ramenées aux États-Unis.

La mère et sa fille font partie d'un groupe de migrants « fuyant les violences conjugales et la brutalité des gangs » en Amérique centrale, ayant déposé plainte mardi avec l'aide de l'ACLU et du Center for Gender and Refugee Studies pour éviter l'expulsion.

Selon l'ACLU, Carmen a fui le Salvador après « 20 ans d'horribles violences sexuelles de la part de son mari et des menaces de mort émanant d'un gang ».

« Carmen a été violée de manière répétée, harcelée et menacée de mort par son mari, même lorsqu'ils vivaient séparément. En juin 2018, elle a fui avec sa fille, demandant l'asile aux États-Unis. Bien que des agents aient conclu que leur récit était véridique, on leur a au final dénié la protection de l'asile parce qu'elles n'avaient pas de «peur crédible de persécution» », a précisé l'organisation sur son site.

En juin, M. Sessions avait annoncé que les États-Unis allaient durcir les procédures de demande d'asile afin de limiter le flux d'immigrants originaires d'Amérique centrale.

Les allégations de violences conjugales ou de violences de la part de gangs ne seront ainsi plus suffisantes pour déposer une requête aux postes-frontières, avait-il déclaré.