La Cour suprême des États-Unis a validé mardi le décret anti-immigration de Donald Trump, offrant une victoire définitive au président américain à l'issue d'une âpre bataille judiciaire autour de cette mesure extrêmement controversée.

La décision, prise à la majorité de cinq juges conservateurs contre les quatre autres progressistes, entérine ce décret qui interdit le territoire américain, de façon permanente, aux ressortissants de six pays, pour la plupart à majorité musulmane.

«Wow!», a très vite réagi M. Trump dans un tweet lapidaire. Il a ensuite salué «une fantastique victoire» pour le peuple américain après «des mois d'hystérie» de la part des médias et des démocrates.

«Tant que je serai président, je défendrai la souveraineté et la sécurité du peuple américain», a-t-il promis dans un communiqué.

La décision est tombée en plein débat sur les arrivées à la frontière mexicaine de migrants d'Amérique centrale, alors que le président Trump a été forcé de reculer sur sa politique de tolérance zéro, se traduisant par des séparations de familles.

La haute cour, dans son arrêt rédigé par le président de l'institution John Roberts, estime que le président n'a fait qu'user de façon légitime de ses prérogatives en matière d'immigration.

«L'État a mis en avant une justification suffisante en termes de sécurité nationale», a écrit le juge Roberts.

Le texte en cause est la troisième mouture d'un décret qui avait provoqué une onde de choc mondiale en étant abruptement mis en vigueur par la Maison-Blanche le 27 janvier 2017, une semaine après l'entrée en fonction de M. Trump.

Cette dernière version ferme les frontières américaines à environ 150 millions de personnes, ressortissantes des pays suivants: Yémen, Syrie, Libye, Iran, Somalie et Corée du Nord. Il bloque aussi l'entrée à certains responsables gouvernementaux du Venezuela.

Les opposants au texte dénonçaient un «décret antimusulman», une thèse vivement combattue par le gouvernement.

«Terroristes étrangers»

Durant l'audience solennelle consacrée au texte en avril, les quatre juges progressistes de la Cour suprême étaient apparus préoccupés par les accusations selon lesquelles ce décret ciblait les musulmans, alors que la Constitution américaine interdit la discrimination religieuse.

«Un observateur raisonnable conclurait que le décret était motivé par un préjugé antimusulman», a d'ailleurs écrit la magistrate Sonia Sotomayor, dans un argumentaire de désaccord joint à l'arrêt.

Cette décision «s'inscrira dans l'Histoire comme l'une des plus grandes erreurs de la Cour suprême», a estimé Omar Jadwat, avocat de l'Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), en pointe de la lutte contre le texte.

Cette affaire était probablement pour la Cour suprême la plus importante de l'année.

Donald Trump soutient depuis son arrivée à la Maison-Blanche qu'il est libre de restreindre l'accès aux États-Unis s'il le juge nécessaire, au nom de la sécurité nationale.

Il martèle que le décret vise à empêcher l'entrée de «terroristes étrangers» en Amérique.

Depuis les attentats du 11 septembre 2001, les attaques les plus graves aux États-Unis ont pourtant été commises soit par des Américains, soit par des personnes ne venant pas des pays visés par le décret.

Préjugé antimusulman?

L'ACLU avait tenté de prouver l'existence de préjugés antimusulmans durables chez M. Trump, en rappelant sa promesse de campagne présidentielle d'interdire l'entrée des États-Unis aux musulmans. Une déclaration qui avait provoqué un émoi planétaire.

M. Trump avait retweeté en novembre des vidéos islamophobes d'une dirigeante d'une formation néofasciste britannique.

Les différentes moutures du décret migratoire ont chacune fait l'objet d'une bataille épique devant les tribunaux américains, avec de multiples rebondissements en première instance et en appel.

La troisième n'a pas échappé à la règle: le texte signé le 24 septembre avait été suspendu le 17 octobre par un juge de Hawaï. Un tribunal du Maryland avait également bloqué la mesure.

Des dizaines d'associations de défense des migrants ou des organisations religieuses ont pris position dans ce débat.

Stephen Yale-Loehr, un universitaire spécialiste des questions migratoires, s'est dit non surpris par la décision de la Cour suprême.

«Vu que l'immigration touche à la sécurité nationale et aux relations avec l'étranger, les tribunaux s'en remettent généralement au président sur ce sujet», a-t-il commenté.

La décision selon lui «est porteuse de vastes conséquences dépassant les pays affectés par le décret».

«Dans les faits, même si le président échoue à persuader le Congrès à financer son mur à la frontière mexicaine, il a érigé un mur invisible pour de nombreux immigrants», a-t-il conclu.