À l'issue d'un étrange psychodrame, le président américain Donald Trump a finalement promulgué vendredi la loi de financement de l'État fédéral, non sans se plaindre amèrement du compromis élaboré par le Congrès entre sa majorité et l'opposition démocrate.

«J'ai signé la loi», a déclaré le dirigeant depuis la Maison-Blanche, mettant fin au suspense sur une éventuelle paralysie du gouvernement fédéral.

Le président septuagénaire avait stupéfié toute la classe politique le matin-même en menaçant, d'un tweet, de mettre son veto à la loi adoptée par le Congrès à majorité républicaine. La veille, son propre directeur du Bugdet avait assuré, la main sur le coeur, que le président signerait le texte.

Pour justifier ses revirements successifs, M. Trump a expliqué, lors d'une longue déclaration un peu décousue, que la loi contenait nombre d'éléments dont il n'était «pas content» mais qu'il avait finalement été convaincu par «les gains enregistrés pour le financement de l'armée».

«Je ne signerai jamais une autre loi comme celle-ci», a-t-il aussitôt averti.

Ce va-et-vient est venu renforcer encore l'impression de chaos régnant à la Maison-Blanche. «Les Américains ont besoin de leadership à la Maison-Blanche, pas de plus de chaos délibéré», a lancé le sénateur démocrate Richard Blumenthal sur Twitter.

Jeudi, la valse des postes s'est poursuivie au sein  de l'équipe rapprochée du locataire de la Maison-Blanche avec le limogeage du conseiller à la sécurité nationale, le général H.R. McMaster, et son remplacement par le «faucon» et analyste de Fox News John Bolton.

En promulguant la loi, Donald Trump assure que l'État fédéral ne fermera pas vendredi à minuit, ce qui aurait été la troisième fermeture depuis le début de l'année.

Le prétexte pour le veto était l'absence de compromis sur l'immigration et la sécurité à la frontière dans la loi, et notamment le fait que le Congrès n'a pas approuvé les crédits importants qu'il réclamait pour ériger un long mur en béton à la frontière mexicaine.

«J'envisage un VETO de la loi de dépenses en raison du fait que les plus de 800 000 bénéficiaires de DACA ont été complètement abandonnés par les démocrates (même pas cités dans la loi) et que le MUR FRONTALIER, dont nous avons désespérément besoin pour notre défense nationale n'est pas totalement financé», avait tweeté le dirigeant.

Négociations dans la douleur

DACA est un programme de permis de séjour temporaires pour de jeunes clandestins, créé par Barack Obama et supprimé en septembre dernier par l'actuel président, qui avait mis au défi le Congrès de voter une réforme migratoire à la place. Mais majorité et opposition n'ont jamais pu trouver un terrain d'entente.

L'annonce avait d'autant plus surpris que la plupart des élus ont quitté la capitale fédérale jeudi soir ou s'apprêtaient à le faire vendredi matin, pour deux semaines de congés.

La loi de finances en question a été négociée pendant des semaines par la majorité républicaine et l'opposition démocrate, dans la douleur, chaque camp ayant dû céder sur la plupart de ses revendications.

D'un montant de près de 1300 milliards, dont 700 pour la seule Défense, elle doit financer l'État fédéral jusqu'à la fin de l'année budgétaire en cours, soit jusqu'au 30 septembre.

Le milliardaire, les républicains et les démocrates (qui disposent d'une minorité de blocage au Sénat) ont longtemps tenté de trouver un compromis pour régulariser des centaines de milliers de jeunes clandestins, en échange de réformes migratoires et du financement de la construction du haut mur en béton promis par Donald Trump à la frontière mexicaine.

Mais leurs positions sont restées inconciliables.

In fine, le dirigeant n'a obtenu que 1,6 milliard pour construire des clôtures ou en rénover quelques dizaines de kilomètres, loin des 25 milliards qu'il avait un temps réclamés.

Et les négociateurs démocrates n'ont rien décroché pour les «Dreamers», les rêveurs, comme sont appelés les clandestins arrivés enfants aux États-Unis.

Des dizaines de républicains conservateurs avaient voté contre la loi pour d'autres raisons, pour protester contre la hausse importante des dépenses publiques. Le groupe des élus du Freedom Caucus avait d'ailleurs encouragé le président à mettre son veto afin de précipiter une réécriture de la loi.

Les démocrates ont accusé le locataire de la Maison-Blanche d'hypocrisie. «N'oublions pas que c'est vous qui avez mis fin à DACA et torpillé tout compromis. C'est de votre faute», a répondu le démocrate Tim Ryan.