Propulsé au premier plan par les taxes sur les importations d'acier et d'aluminium, Peter Navarro, l'intransigeant conseiller au commerce de la Maison-Blanche, a finalement su faire entendre sa voix, radicale, dans son combat contre la Chine.

Suivant ses recommandations, Donald Trump s'apprêtait jeudi à signer «un memorandum présidentiel ciblant l'agression économique de la Chine».

Conseiller du président pendant la campagne, cet économiste diplômé de la prestigieuse université de Harvard, a largement contribué à façonner la politique commerciale de Donald Trump vis-à-vis du géant asiatique. Celui-ci est accusé de faire «une concurrence déloyale» aux entreprises américaines en subventionnant largement ses exportations et en dérobant leurs droits de propriété intellectuelle.

Peter Navarro avait rassemblé ces idées formulées sur un ton incendiaire dans un livre intitulé Death by China: how America lost its manufacturing base (La mort par la Chine: comment l'Amérique a perdu sa base industrielle) publié en 2011.

Dans cet ouvrage, il arguait que la Chine viole le principe du commerce équitable en subventionnant illégalement ses exportations et en manipulant sa monnaie. Il déplorait la désindustrialisation des États-Unis.

Allure élégante et chevelure blanchie par les années - Peter Navarro aura 69 ans le 15 juillet - cet ancien professeur de l'université de Californie, à Irvine, est loin de faire l'unanimité parmi ses pairs.

Alors que de nombreux économistes estiment que le traité de libre-échange nord-américain (ALENA) a globalement été bénéfique pour l'économie des États-Unis, Peter Navarro a constamment critiqué cet accord et les traités de libre-échange en général, s'efforçant de convaincre le président américain de s'en retirer.

À défaut d'un retrait, Donald Trump a imposé au Canada et au Mexique, ses deux partenaires de l'ALENA, la renégociation de ce traité en vigueur depuis 1994. Avant cela, il avait mis fin, en janvier 2017, au traité de libre-échange transpacifique (TPP), faisant écho à la rhétorique de son conseiller: les traités commerciaux mal négociés ont été mauvais pour les entreprises et les travailleurs américains.

Pour autant, la cible privilégiée de Peter Navarro est la Chine. Et c'est par elle qu'il est finalement revenu sur le devant de la scène.

«Visionnaire»

Un temps placé dans l'ombre du principal conseiller économique de la présidence, Gary Cohn, à qui il devait envoyer en copie ses courriels adressés à Donald Trump, Peter Navarro a contribué à la démission, le 6 mars, de cet ancien numéro deux de Goldman Sachs, respecté par les marchés mais trop modéré pour adhérer à la politique ultra protectionniste de Donald Trump.

Lorsque, début mars, le président a déclaré vouloir imposer des taxes sur toutes les importations d'acier et d'aluminium, Peter Navarro a, lui, multiplié ses apparitions dans les médias pour soutenir Donald Trump.

C'est lui aussi qui, la semaine dernière, annonçait sur CNBC l'imminence de mesures de rétorsion aux «vols de propriété intellectuelle» commis par Pékin.

En le nommant en décembre 2016 à la tête d'un Conseil du commerce national, un bureau dépendant de la Maison-Blanche nouvellement créé, Donald Trump l'avait présenté comme «un économiste visionnaire».

La presse chinoise s'était, elle, immédiatement inquiétée de ce choix d'un conseiller notoirement hostile à Pékin qui risquait d'attiser une guerre commerciale.

Affilié au parti démocrate historiquement plus protectionniste que le parti républicain, Peter Navarro a passé un diplôme en arts avant de décrocher un master en administration publique à Harvard.

Né le 15 juillet 1949 d'un père saxophoniste et d'une mère secrétaire, il a été élevé par sa mère après le divorce de ses parents. Il a passé son adolescence à Bethesda, la banlieue chic de Washington.