Deux sénateurs républicains ont donné de la voix mercredi pour dénoncer, en termes extrêmement forts, les «assauts» du président Trump contre la presse, l'un d'eux l'accusant d'avoir recours à une rhétorique stalinienne.

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«2017 fut l'année où la vérité - objective, empirique, basée sur des faits - a été plus la plus bousculée et maltraitée dans l'histoire de notre pays, aux mains du personnage le plus important de notre gouvernement», a lancé devant le Congrès le sénateur Jeff Flake, farouche détracteur du locataire de la Maison-Blanche.

Cette virulente charge intervient le jour même où le 45e président des États-Unis devait présenter, si l'on croit son compte Twitter, ses «Fake News Awards».

Ces «récompenses», promises par le dirigeant de la première puissance mondiale aux médias «les plus corrompus et les plus biaisés», devaient initialement être annoncées la semaine dernière mais ont été repoussées.

Le président américain, dont les attaques contre les journalistes «malhonnêtes» sont quasi-quotidiennes, reproche en particulier à ces derniers d'accorder trop d'attention à l'enquête du procureur spécial Robert Mueller sur une éventuelle collusion avec la Russie qui est selon lui sans fondement.

Quelques heures avant le discours de M. Flake, un autre sénateur républicain, John McCain, ancien candidat à la présidentielle et figure du Congrès, avait, dans une tribune, appelé M. Trump à arrêter «d'attaquer la presse».

Pour Jeff Flake, qui a annoncé qu'il ne se représenterait pas à l'issue de son mandat fin 2018, le temps du sursaut est venu : il n'est plus possible d'ignorer les «assauts» contre les médias d'un président «qui ne supporte pas la critique».

«"L'ennemi du peuple", c'est comme cela que le président des États-Unis a qualifié la presse en 2017», a-t-il lancé, rappelant que ces mots «tristement célèbres» avaient été prononcés par l'ancien dirigeant russe Joseph Staline «pour décrire ses ennemis».

«Voilà où nous en sommes»

Pour John McCain, qui a plusieurs fois défié Donald Trump depuis son arrivée au pouvoir il y a un an, l'attitude du président vis-à-vis des médias pose un problème pour l'Amérique, mais aussi pour le monde.

«Que Trump en soit conscient ou pas, ses actes sont observés de près par des dirigeants étrangers qui utilisent déjà ses mots comme excuse», a-t-il souligné,  dénonçant l'attitude «incohérente» voire «hypocrite» de l'administration vis-à-vis de la liberté de la presse.

«Tandis que des responsables condamnent souvent les violences contre des journalistes à l'étranger, Trump continue ses attaques incessantes contre l'intégrité de journalistes et de médias américains», a-t-il déploré.

«L'expression "fake news" à laquelle le président américain a donné une légitimité, est utilisée par des autocrates pour réduire au silence des journalistes», a encore écrit le sénateur de 81 ans, qui avait, durant la campagne, dénoncé sans détour le comportement de l'homme d'affaires de New York.

«Les journalistes jouent un rôle central dans la promotion et la protection de la démocratie et de nos droits inaliénables», a-t-il ajouté, déplorant lui aussi l'annonce présidentielle des Fake News Awards.

Interrogé mardi sur cet événement aux contours flous, Sarah Huckabee Sanders, porte-parole de Donald Trump, est restée aussi évasive que possible.

«Le fait qu'un président américain puisse s'adonner à un tel spectacle défie l'entendement», a estimé le sénateur Flake. «Mais voilà où nous en sommes».

AP

Jeff Flake