La pression monte sur la Maison-Blanche, empêtrée dans l'affaire des ingérences russes dans la présidentielle américaine: le gendre de Donald Trump est visé par l'enquête du FBI dont l'ex-directeur limogé par le président doit bientôt témoigner devant le Congrès.

Le Washington Post a affirmé vendredi soir que Jared Kushner aurait demandé, lors d'une rencontre avec l'ambassadeur russe Sergueï Kisliak à la Trump Tower le 1er ou le 2 décembre, avant l'entrée en fonctions de M. Trump, que soit établi un canal secret de communication avec le Kremlin. L'ex-conseiller à la sécurité nationale de la Maison-Blanche Michael Flynn aurait été présent.

M. Kisliak, surpris par cette proposition, l'aurait transmise au Kremlin, poursuit le journal.

La Maison-Blanche s'est refusée à tout commentaire. M. Trump boucle ce week-end sa première tournée présidentielle à l'étranger.

Homme d'affaires devenu conseiller du président en politique étrangère, M. Kushner, 36 ans, est le mari d'Ivanka Trump, fille préférée de M. Trump.

S'il est sur l'écran radar du FBI, le Post comme d'autres médias américains soulignent qu'il n'est ni la «cible» principale de la tentaculaire enquête fédérale et encore moins soupçonné du moindre délit.

Selon la télévision NBC, les policiers «pensent que Kushner a des informations importantes».

L'avocat de M. Kushner, Jamie Gorelick, a répondu que son client «s'était déjà volontairement proposé de partager avec le Congrès ce qu'il sait de ces rencontres. Il en fera de même pour toute autre enquête».

Citant des sources proches de l'enquête, le Washington Post avait affirmé plus tôt vendredi que «les enquêteurs se concentrent sur une série de réunions qu'a eues Jared Kushner (...) dans le cadre de leur enquête sur l'ingérence russe dans l'élection de 2016», avec l'ambassadeur russe et Sergueï Gorkov, président de la banque publique russe Vnesheconombank, sanctionnée par Washington depuis 2014 en raison du conflit en Ukraine.

«Ne pas révéler des contacts est devenu une habitude, cela pose question», a relevé l'élu démocrate du Connecticut Jim Himes, membre de la commission du Renseignement de la Chambre des représentants. «S'il est vrai que quelqu'un a demandé une sorte de ligne privée, de mode de communication sécurisé inhabituel, cela soulève réellement toutes sortes de questions».

«Coordination»

L'enquête du FBI, désormais dirigée par le procureur spécial Robert Mueller, doit faire la lumière sur une possible «coordination» entre l'équipe de campagne de Donald Trump et des responsables russes.

Les services de renseignement américains ont depuis longtemps la conviction qu'il y a eu des «interactions» entre l'entourage de M. Trump et des cadres de Moscou. L'ancien directeur de la CIA John Brennan l'a réaffirmé cette semaine devant le Congrès.

De même, James Comey, le patron du FBI limogé avec fracas par M. Trump le 9 mai, avait confirmé en mars une enquête sur des interférences russes dans la présidentielle.

De quel type d'ingérence précisément des responsables russes sont-ils accusés?

Par un piratage de moyens de communication du parti démocrate et de l'équipe de campagne de Hillary Clinton, ces responsables de Moscou ont jeté le discrédit sur elle, faisant potentiellement pencher la balance électorale en faveur du milliardaire.

On ne sait pas en revanche si Moscou l'aurait fait en concertation avec l'équipe du candidat Trump.

Le parti démocrate a jugé vendredi que «l'enquête du FBI sur la Russie touchait maintenant la maison Trump».

Outre les investigations du FBI et du ministère de la Justice, le Congrès, où les républicains sont majoritaires, enquête.

Selon le Post, la commission du Renseignement du Sénat a demandé à l'équipe politique de M. Trump de «rassembler et fournir tous les documents, courriels et enregistrements téléphoniques liés à la Russie depuis le lancement de sa campagne en juin 2015».

Selon le New York Times, le milliardaire russe Oleg Deripaska, propriétaire du géant de l'aluminium Rusal et un temps proche de l'ancien directeur de la campagne Trump Paul Manafort qui est également visé par l'enquête du FBI, a offert de collaborer avec les commissions du Congrès.

À partir du 30 mai, après le long week-end du Memorial Day, James Comey devrait témoigner devant les commissions du Renseignement du Sénat et de la Chambre des représentants.

Onde de choc

Il déclencherait une onde de choc s'il confirmait avoir subi des pressions de Donald Trump.

Car selon des notes de M. Comey révélées par le New York Times, le président lui aurait demandé de clore son enquête sur Michael Flynn qui avait dû démissionner en février, trois semaines après l'investiture de M. Trump, pour avoir dissimulé ses contacts fin 2016 avec l'ambassadeur russe.

Sous le coup d'une injonction du Congrès et accusé d'avoir reçu des paiements non déclarés de la part d'entités russes, M. Flynn a invoqué son droit au silence.

Le président américain a toujours nié le moindre lien personnel avec Moscou. Il a même qualifié les enquêtes de «chasse aux sorcières» et de «coup monté» des démocrates.

Lorsqu'il était candidat et au début de son mandat, M. Trump ne cessait de prôner un rapprochement avec la Russie. Il a depuis durci sa position et, vendredi, en marge du sommet du G7 en Sicile, le conseiller économique de la Maison-Blanche Gary Cohn a exclu tout allégement des sanctions contre Moscou.