Les opposants démocrates à Donald Trump ont promis une guerre de tranchées pour ralentir la nomination d'un juge conservateur à la Cour suprême et celles des principaux membres de son administration, au risque de donner des munitions au président, élu pour «nettoyer le marigot» washingtonien.

Après avoir vu la plupart de leurs efforts bloqués pendant une bonne partie des années Obama par un Congrès à majorité républicaine, encaissé une défaite à la présidentielle et assisté impuissants depuis l'arrivé de Donald Trump à la Maison-Blanche à la démolition du legs de son prédécesseur, les démocrates tiennent l'occasion de prendre leur revanche.

Le leader de la minorité démocrate au Sénat Chuck Schumer a d'ores et déjà prévenu qu'il insistera pour que le nouveau juge à la Cour suprême retenu par Donald Trump, Neil Gorsuch, soit confirmé avec une supermajorité de 60 votes de sénateurs sur 100.

Il n'y a que 52 sénateurs républicains et ce scénario les obligerait à convaincre au moins huit de leurs adversaires démocrates.

En cas de blocage, les républicains pourraient aussi changer les règles pour pousser leur candidat à travers une majorité simple, «l'option nucléaire» comme est surnommée cette éventualité.

«Si nous sommes bloqués ainsi je dirais: «Si tu peux Mitch, prend l'option nucléaire». Parce que ce serait une honte absolue qu'un homme de sa qualité soit négligé», a déclaré Donald Trump mercredi matin en parlant de Mitch McConnell, chef de la majorité républicaine au Sénat.

«Nous voulons qu'il (M. Gorsuch) passe par un processus de nomination élégant, pas par un processus dégradant parce qu'ils sont vraiment dégradants de l'autre côté, et ils veulent vous faire passer pour aussi mauvais que possible, et la presse peut être très dégradante aussi», a ajouté le président lors d'une réunion avec Neil Gorsuch.

Politique d'obstruction

Un voeu pieux probablement, car ces élus démocrates veulent entrer en résistance et l'ont fait savoir dès l'annonce de la nomination du juge Neil Gorsuch à la Cour suprême mardi soir.

«Les juges de la Cour suprême doivent pouvoir s'opposer à un président qui veut détourner la Constitution. J'ai de sérieux doutes sur l'aptitude du juge Gorsuch à satisfaire à cette exigence» , a ainsi tweeté Chuck Schumer.

Il faut dire qu'après le décès soudain du juge Antonin Scalia en février dernier, les sénateurs républicains n'avaient voulu ne serait-ce qu'auditionner le candidat choisi par Barack Obama pour le remplacer, Merrick Garland.

Cette politique d'obstruction, critiquée, car sabotant le jeu normal des institutions, semble avoir fini par payer pour les républicains, même si le processus de confirmation du juge Gorsuch pourrait, en tout état de cause, durer plusieurs mois.

Le choix par Donald Trump de ce magistrat de 49 ans arrime la Cour suprême à droite, possiblement le temps d'une génération, pour le plus grand bonheur des religieux traditionalistes, des militants des armes à feu, ou encore des partisans de la peine de mort.

Donald Trump lui fustige le blocage systématique de ses adversaires politiques, qui ont boycotté plusieurs auditions de commissions sénatoriales pour entendre les candidats controversés pour les postes de ministre du Trésor (Steven Mnuchin) et de la Santé (Tom Price).

La réponse des républicains a été cinglante: ils ont contourné mercredi la règle du quorum pour faire approuver ces deux ministres, une décision sans précédent.

MM. Mnuchin et Price doivent toutefois encore être approuvés par le Sénat dans son ensemble, mais seulement à la majorité simple.

Le Vatican «préoccupé»

Donald Trump devrait malgré tout obtenir gain de cause sur l'un des postes les plus importants de son administration: sauf énorme surprise, le Sénat doit confirmer mercredi après-midi l'ancien PDG d'ExxonMobil, Rex Tillerson, comme secrétaire d'État.

La nomination du nouveau juge à la Cour suprême a en tout cas détourné un peu l'attention du décret anti-immigration signé par Donald Trump vendredi qui suspend l'entrée aux États-Unis des ressortissants de sept pays à majorité musulmane et de tous les réfugiés.

De très nombreux pays ont condamné cette mesure.

Mercredi, c'est le Vatican qui a fait part de sa «préoccupation» sur le sujet: «Nous sommes les messagers d'une autre culture, celle de l'ouverture», a déclaré à la chaîne catholique Tv2000 Mgr Angelo Becciu, numéro 3 du Vatican.

Même la première ministre britannique, Theresa May, pourtant une alliée enthousiaste de M. Trump, a été obligée de reconnaître que le décret est «une erreur et sème la discorde».

Les Émirats arabes unis ont préféré ne pas accabler M. Trump, estimant que son décret ne visait pas spécifiquement l'islam et n'était que provisoire.