Le président américain Donald Trump prépare un décret qui pourrait ouvrir la voie à la réouverture des contestées prisons secrètes de la CIA à l'étranger, fermées par Barack Obama, selon des journaux américains mercredi, mais la Maison Blanche a contesté être l'auteur du document publié.

«Ce n'est pas un document de la Maison-Blanche», a déclaré le porte-parole de la Maison Blanche, Sean Spicer. «Je ne sais pas du tout d'où il vient», a-t-il ajouté, sans dire s'il s'agissait ou non d'un texte préparé pour le président.

Le projet de décret de trois pages, publié par le New York Times et le Washington Post, révoquerait des décrets signés par Barack Obama en janvier 2009 et qui avaient ordonné la fermeture de la prison de Guantanamo (une fermeture bloquée par le Congrès) et des «sites noirs» de la CIA en dehors du pays; qui avaient permis l'accès de la Croix Rouge à tous les détenus des États-Unis dans le monde; et mis fin à des techniques d'interrogatoires assimilées à de la torture.

Ce projet de décret de M. Trump ne déclencherait pas, à lui seul, la réouverture des prisons de la CIA créées en secret sous la présidence de George W. Bush au début de la «guerre contre le terrorisme» dans plusieurs pays (Pologne, Lituanie, Roumanie, Afghanistan, Thaïlande).

Mais il ouvrirait la voie à leur réouverture en demandant au directeur du Renseignement national de soumettre ses recommandations quant à leur utilité.

Le décret réitérerait l'interdiction du recours à la torture, tout en appelant à envisager une modification du manuel d'interrogatoire utilisé par l'armée américaine et la CIA.

Quant à Guantanamo, selon le document publié par le Washington Post, le texte demanderait au Pentagone de continuer à y envoyer des prisonniers d'Al Qaïda et du groupe État islamique. Il n'y reste actuellement que 41 prisonniers.

L'interdiction de la torture a été inscrite dans le marbre du droit américain par une loi votée en 2015 par le Congrès. Les États-Unis ne peuvent avoir recours qu'aux techniques d'interrogatoire stipulées dans le manuel de l'armée, ce qui exclut légalement la «simulation de noyade», utilisée quelques temps sous George W. Bush et formellement interdite par Barack Obama. Un décret ne peut changer cette loi.

«Le président peut signer tous les décrets qu'il veut, mais la loi est la loi», a réagi le sénateur républicain John McCain dans un communiqué. «Nous ne ramènerons pas la torture aux États-Unis».

Le sénateur McCain a aussi rappelé que le nouveau directeur de la CIA, Mike Pompeo, s'était engagé à ce que ses agents limitent leurs techniques d'interrogatoire à celles énumérées dans le manuel de l'armée. Le nouveau secrétaire à la Défense, l'ancien général James Mattis, lui a donné le même engagement pour ses troupes.

«La seule mention du fait que nous pourrions réinstaurer ces politiques discréditées nuit gravement à notre stature internationale», a déploré l'élu démocrate Adam Schiff.

En février 2016, le candidat Donald Trump avait déclaré: «la torture marche», en promettant qu'il réinstaurerait la technique de simulation de noyade («waterboarding»). En novembre, après avoir rencontré James Mattis, il s'était dit «impressionné» par les arguments du général contre la torture, sans toutefois dire s'il avait changé d'opinion.

Photo BRENDAN SMIALOWSKI, Agence France-Presse

«Le président peut signer tous les décrets qu'il veut, mais la loi est la loi», a réagi John McCain dans un communiqué.