C'est sa dernière prise de parole publique en tant que président: Barack Obama répond mercredi, à deux jours son départ, aux questions des journalistes, nanti d'une cote de popularité au zénith proche de celle dont il bénéficiait à son arrivée au pouvoir en 2009.

Sondage après sondage, les chiffres sont tous flatteurs pour le président démocrate qui s'apprête à céder la place au républicain Donald Trump, élu le 8 novembre à la surprise générale. Confronté à une série d'enquêtes défavorables, ce dernier a dénoncé mardi avec véhémence des «sondages truqués».

Cruelle ironie pour Barack Obama qui rêvait qu'un démocrate lui succède pour cimenter son bilan: la coalition qui l'a porté au pouvoir à deux reprises (2008 et 2012) s'est peu mobilisée dans les urnes en faveur d'Hillary Clinton, mais tire vers les bas les chiffres de popularité du magnat de l'immobilier qui s'apprête à lui succéder.

Selon le dernier sondage en date, réalisé par CNN/ORC et diffusé mercredi, 60 % des Américains approuvent l'action de Barack Obama, son meilleur score depuis juin 2009.

Il figure en haut de tableau des présidents en fin de mandat, juste derrière Bill Clinton (66 % en janvier 2001) et Ronald Reagan (64 % en janvier 1989). Par ailleurs, près de deux tiers des Américains (65 %) estiment que sa présidence a été un succès.

Le président démocrate, 55 ans, doit se présenter mercredi à 14h15 devant les journalistes dans la salle de presse de la Maison-Blanche.

Dans son dernier discours, il y a une semaine à Chicago, il avait exhorté les Américains à être des acteurs vigilants du processus démocratique.

«La démocratie peut flancher lorsque nous cédons à la peur», avait-il mis en garde. «Notre démocratie est menacée à chaque fois que nous la considérons comme acquise», a-t-il insisté, soulignant que la constitution américaine, «remarquable cadeau», n'avait aucun pouvoir en tant que tel.

Trump «n'aime pas tweeter»

Le président élu, dont les diatribes matinales sur Twitter - de la diplomatie aux commentaires sur telle ou telle émission de télévision - tiennent le monde en haleine, a lui assuré qu'il n'aime pas utiliser ce réseau social.

«Je n'aime pas tweeter», a-t-il affirmé dans un entretien accordé à Fox News. «J'ai d'autres choses à faire. Mais j'ai droit à une couverture médiatique très malhonnête, à une presse très malhonnête. Et c'est la seule manière que j'ai trouvée de réagir».

Il a par ailleurs confirmé qu'il avait l'intention de poursuivre sur la même voie une fois installé dans le Bureau ovale.

Il pourra pour ce faire continuer à utiliser son compte actuel @realDonaldTrump ou utiliser le compte @POTUS (acronyme de «President of the United States»), lancé il y a un peu plus d'un an par la Maison-Blanche et qui sera mis à la disposition du 45e président des États-Unis.

Le compte conservera ses plus de 13 millions d'abonnés, mais la «timeline» (flux de messages) sera remise à zéro. Un nouveau compte, @POTUS44, rassemblera tous les tweets envoyés par Barack Obama (près de 350) qui seront par ailleurs archivés.

Les préparatifs se poursuivaient pour la prestation de serment de Donald Trump, qui sera investi président par un juge de la Cour suprême, John Roberts, vendredi à midi devant le Capitole.

Selon son porte-parole, Sean Spicer, Donald Trump a écrit son discours lui-même avec l'aide de ses proches conseillers. M. Spicer a aussi prédit «une foule record» pour la cérémonie.

Les autorités disent attendre entre 800 000 et 900 000 personnes vendredi, une estimation prudente et comparable au million venu assister à la seconde prestation de serment de Barack Obama en 2013.

Seuls ceux qui auront obtenu une place par l'intermédiaire de leurs parlementaires pourront se trouver dans la zone la plus proche du Capitole, les autres regarderont la cérémonie à distance sur des écrans géants.

La vie d'après: l'écriture, les minorités et les démocrates

Écrire un livre, travailler avec les jeunes issus des minorités, aider à reconstruire un parti démocrate en lambeaux: Barack Obama a promis d'être un «citoyen» actif.

À 55 ans, soit un an de moins que Bill Clinton à la fin de sa présidence, armé d'une solide cote de popularité, il assure vouloir s'impliquer dans de nouveaux projets et éviter à tout prix d'être «le vieux type qui traîne au bar et ressasse ses gloires passées».

Il a annoncé qu'il ne participerait pas à la «mêlée» politique et précisé qu'il ne commenterait pas, sauf sur des points touchant «aux fondements mêmes de la démocratie», les initiatives de son successeur Donald Trump dont il avait, durant la campagne, dénoncé avec virulence les prises de position.

À très court terme, dès la prestation de serment de son successeur terminée vendredi, il partira en vacances à Palm Springs avec sa femme, Michelle, et ses deux filles adolescentes.

Ensuite ? «J'ai besoin d'être silencieux pendant quelque temps. Pas seulement politiquement, mais aussi en moi-même. Il faut digérer tout ce qui s'est passé», expliquait-il il y a quelques jours dans un entretien sur CNN avec son ex-conseiller David Axelrod.

Les ex-présidents s'attardent rarement dans la capitale fédérale américaine après avoir travaillé et vécu dans le plus ancien de ses bâtiments publics.

Jimmy Carter a retrouvé la Georgie, Ronald Reagan la Californie. Bill Clinton a opté pour New York où il a créé sa Fondation et où sa femme Hillary a lancé sa carrière politique comme sénatrice.

Barack Obama, qui n'a jamais exprimé un véritable enthousiasme pour cette ville, y a loué une maison le temps que la plus jeune de ses filles, Sasha, termine ses années de lycée.

À moyen terme, le premier président noir des États-Unis a évoqué sa volonté de travailler avec les jeunes issus des minorités dans les quartiers défavorisés, où l'échec scolaire, le chômage et un taux d'incarcération sont nettement plus élevés qu'ailleurs, pour que «l'égalité des chances ne soit pas une formule creuse».

La Cour suprême ? «Trop monastique»

La défaite surprise d'Hillary Clinton et la victoire de Donald Trump, qu'il reconnaît n'avoir pas vu venir, a aussi changé la donne. Et le président démocrate a clairement indiqué qu'il entendait s'impliquer dans la reconstruction de son parti.

«Je veux faire tout ce que je peux pour mettre en valeur et aider la prochaine génération, pas seulement au niveau politique, mais aussi de l'engagement citoyen. J'ai les contacts et je pense la crédibilité pour faire cela de façon originale».

Et Barack Obama entend peser dans la balance pour que son parti aille plus loin que «les ciblages ultra-précis pour emporter une élection présidentielle», mais soit aussi présent, bien au-delà des fiefs démocrates que sont les grandes villes, dans les zones «où les gens se sentent ignorés».

Plusieurs anciens locataires de la Maison-Blanche ont réussi à laisser une trace de leur vie post-Washingtonienne.

Battu en 1829 après un mandat, John Quincy Adams a été élu au Congrès où il a siégé jusqu'à la fin de sa vie. Servi par des talents d'orateur hors pair, il a marqué les esprits pour le combat sans relâche contre l'esclavage qu'il y a mené.

William Howard Taft (1909-1913) a rejoint la Cour suprême. Ancien président de la prestigieuse «Harvard Law Review» et passionné de droit, Barack Obama a d'ores et déjà dit qu'il n'était pas intéressé: «Trop monastique pour moi», a-t-il tranché.

L'exemple de ses deux prédécesseurs démocrates encore en vie - Jimmy Carter et Bill Clinton - qui ont monté des fondations respectées au-delà des frontières américaines, pourrait être un repère. Barack Obama devrait s'appuyer sur son Centre présidentiel, qui sera construit à Chicago, pour développer nombre de ses initiatives.

Des rumeurs récurrentes lui prêtent l'envie de donner des cours à la Columbia University (New York), où il a étudié au début des années 80. «Le contact avec les étudiants me manque», confiait-il au New Yorker à l'automne 2014.

Exercice rituel et extrêmement lucratif pour les «ex» - la presse américaine a évoqué un contrat dépassant 20 millions de dollars - Barack Obama, auteur de deux livres à succès (Les rêves de mon père et L'audace d'espérer) a aussi prévu d'écrire ses mémoires.

Il pourra s'appuyer pour cela sur le journal qu'il rédige depuis ses années d'étudiant et qu'il a tenu aussi durant ses deux mandats avec la Maison-Blanche, mais «pas avec la rigueur» qu'il aurait souhaité: «Je n'avais tout simplement pas le temps».