Pour la dernière fois de sa présidence, Barack Obama montera mardi soir à la tribune, à Chicago : doté d'un charisme indéniable, le président américain apprécie particulièrement cet exercice du discours.

Nombre d'entre eux, qui ont marqué des étapes de son passage à la Maison-Blanche, étaient porteurs d'un souffle. Au risque, parfois, de se voir reprocher un optimisme excessif.

Pour Cody Keenan, sa principale plume (« speechwriter »), la recherche d'un équilibre entre la volonté d'offrir une perspective et « le réel danger d'être déconnecté » est au coeur du travail de chaque texte, qui doit « raconter une histoire ».

« Au début de la présidence, il y avait des discussions en interne pour savoir jusqu'où aller dans l'optimisme et la vision d'avenir dans un discours sur l'économie lorsque le taux de chômage était encore à 8-9 % », raconte-t-il à l'AFP.

Ancien professeur de droit, Barack Obama est très impliqué dans la rédaction des textes qu'il prononce.

« On s'assoit avec lui dans le Bureau ovale, il nous donne les idées générales. On travaille dessus un jour ou deux, on lui donne une première ébauche », explique Cody Keenan.

« S'il ne l'aime pas, il prend une grande feuille vierge et écrit lui-même, sinon il annote le document dans tous les sens », ajoute-t-il, évoquant trois ou quatre brouillons successifs avant d'arriver au texte final... qui sera souvent modifié à la dernière minute.

Retour sur cinq discours du 44e président des États-Unis.

BOSTON - L'irruption sur la scène politique - (27 juillet 2004)

« Il n'y a pas une Amérique progressiste et une Amérique conservatrice. Il y a les États-Unis d'Amérique. Il n'y a pas une Amérique noire, une Amérique blanche, une Amérique latina et une Amérique asiatique. Il y a les États-Unis d'Amérique ».

Quasi inconnu sur la scène nationale, ce jeune homme né d'un père kényan et doté d'un nom étrange « Barack Hussein Obama », crève l'écran lors de la convention démocrate de 2004.

« Ce fut probablement le discours qui a le plus marqué », juge Cody Keenan. « Ce qu'il a réussi à faire ? Raconter l'histoire de l'Amérique et raconter son histoire en tissant les deux ensemble ».

LE CAIRE - L'appel au monde musulman - (4 juin 2009)

« Je suis venu chercher un nouveau départ entre les États-Unis et les musulmans à travers le monde, un départ fondé sur l'intérêt mutuel et le respect mutuel ».

En commençant en arabe par un « Salam aleikum » (« que la paix soit sur vous ») à l'adresse des 1,5 milliard de musulmans, Barack Obama appelle à mettre fin « au cycle de la méfiance et de la discorde ».

OSLO - Guerre et paix - (10 décembre 2009)

« Dire que la guerre est parfois nécessaire n'est pas un appel au cynisme, c'est la reconnaissance de l'histoire, des imperfections de l'homme et des limites de la raison ».

Moins d'un an après son arrivée au pouvoir, Barack Obama livre, en recevant le prix Nobel de la paix, sa vision des conditions du recours à la force.

Et reconnaît d'entrée, pour couper court à la polémique, « la controverse considérable » que cette décision de le couronner a suscité : « Je suis au début, non à la fin, de mes efforts sur la scène mondiale ».

SELMA - La longue marche se poursuit - (7 mars 2015)

« Il nous suffit d'ouvrir nos yeux, nos oreilles et nos coeurs pour savoir que l'ombre de l'histoire raciale de ce pays plane toujours sur nous ».

Sous un soleil de plomb, devant le pont Edmund Pettus, théâtre un demi-siècle plus tôt de la répression brutale d'une marche pour les droits civiques, un « Bloody Sunday » qui traumatisa l'Amérique, le premier président noir de l'histoire des États-Unis appelle à la vigilance.

Accompagné de sa femme Michelle, de ses deux filles Malia et Sasha et d'une cinquantaine de personnes, il traverse ensuite, à pied, le pont tristement célèbre, au-dessus du fleuve Alabama.

CHARLESTON - Amazing Grace - (26 juin 2015)

« Trop longtemps, nous avons ignoré la façon dont les injustices du passé continuent à façonner le présent ».

Après la fusillade dans laquelle neuf Afro-Américains ont péri sous les balles d'un jeune partisan de la suprématie blanche, Barack Obama prononce l'éloge funèbre du pasteur Clementa Pinckney.

À l'issue d'un discours aux accents de « preacher », dans lequel il appelle l'Amérique à la lucidité, sur le racisme comme sur les armes à feu, il entonne, à la surprise générale, le chant chrétien « Amazing Grace », repris avec ferveur par des milliers de personnes.

« Les paroles étaient mentionnées deux fois dans le discours », raconte Cody Keenan.

« Le matin même, dans l'hélicoptère qui nous menait à la base militaire d'Andrews (d'où décolle Air Force One), il me dit : "je vais peut-être le chanter, si je le sens bien..." ».