Une nouvelle loi autorisant le port d'armes dans les universités au Texas est dénoncée par des étudiants, des professeurs et par le président de l'Université du Texas à Austin. «Cette loi est une aberration», dit une professeure. Explications.

ARMES

Les 50 000 étudiants inscrits à l'Université du Texas à Austin et leurs professeurs devront bientôt composer avec une nouvelle présence en classe : celle de gens armés. Mercredi, le président de l'Université, Gregory Fenves, a dit qu'il comptait se conformer à une nouvelle loi de l'État autorisant les personnes détenant un permis de port d'armes cachées (concealed weapon) à avoir leur arme sur eux dans les universités publiques. «Je ne crois pas que les revolvers aient leur place dans un contexte universitaire voué à l'éducation et à la recherche, a dit M. Fenves. Néanmoins, en tant que président d'une université publique, je suis responsable d'appliquer la nouvelle loi.»

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Des étudiants de l'Université du Texas ont dénoncé le port d'armes en classe lors d'une manifestation en octobre dernier. 

SURPRISE

Cela faisait des années que la loi était discutée par les élus au Texas. Andrea Brauer, directrice du groupe Texas Gun Sense, favorable au contrôle des armes à feu, croyait que cela n'irait pas plus loin. «J'ai été surprise. Ici, à Austin, la majorité des gens sont contre. Sur le campus, les gens sont très en colère. Les étudiants manifestent, ils organisent des pétitions, ils menacent d'intenter des poursuites. Un professeur a démissionné, d'autres ont dit publiquement qu'ils n'accepteraient pas d'armes dans leur classe», dit-elle.

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Cela faisait des années que la loi était discutée par les élus du Texas.

ÉCONOMIE

Joan Neuberger, professeure au département d'histoire de l'Université du Texas à Austin, se déclare «outrée» par la loi, à laquelle une «majorité écrasante» d'étudiants et de professeurs sont opposés, dit-elle. «L'idée d'avoir une personne armée dans ma classe me met mal à l'aise. Nous avons manifesté, nous avons écrit des lettres. Le président de l'université aurait pu se battre davantage pour que les salles de cours soient exemptées, mais il ne l'a pas fait.» Les professeurs songent-ils à quitter l'université ? «Dans le contexte économique, beaucoup n'ont pas le luxe de laisser leur emploi», fait-elle remarquer.

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Une statue de George Washington trône au centre de l'Université du Texas à Austin.

DOGMATISME

La loi ne s'applique qu'aux universités publiques au Texas : les universités privées sont libres d'autoriser ou non les armes à feu sur le campus, ce qu'aucune n'a voulu faire. «Même des universités privées très conservatrices ont décidé de continuer à interdire les armes, dit Joan Neuberger. Ça en dit long sur le besoin réel d'avoir une telle loi.» Dominés par les élus républicains, la Chambre des représentants et le Sénat du Texas ont appuyé la loi par dogmatisme politique, croit Mme Neuberger. «Ne nous racontons pas d'histoires. Presque tout le monde dans la communauté universitaire trouve que c'est une idée révoltante.»

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La nouvelle loi de l'État autorise les personnes détenant un permis de port d'armes cachées (concealed weapon) à avoir leur arme sur eux dans les universités publiques du Texas.

SEPT ÉTATS

Andrea Brauer note que les étudiants qui voudraient être armés devront avoir un permis de port d'armes cachées, document inaccessible aux moins de 21 ans. «Un très petit nombre d'étudiants pourraient un jour avoir une arme, mais personne ne saura exactement combien, car la loi prescrit que les armes doivent être cachées.» Le Texas n'est pas pionnier dans l'autorisation des armes à feu dans les universités. Le Colorado, le Kansas, le Mississippi, l'Oregon, l'Utah et le Wisconsin les permettent. Ironiquement, la loi texane doit entrer en vigueur le 1er août 2016, 50 ans après qu'un tireur a tué 16 personnes sur le campus de l'Université du Texas à Austin.